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Pour se sauver de la faillite, Presstalis plombe la presse indépendante

Crise de la presse, baisse des tirages et des points de vente, Presstalis est en faillite et dégaine un plan de sauvetage à 140 millions, qui risque de se faire au détriment de nombreux titres indépendants. Parmi eux, Canard PC lance une campagne de financement participatif pour sauver ses plumes.

 

Titanic

Principal distributeur de journaux et magazines de France devant MLP (les Messageries lyonnaises de presse), Presstalis (anciennement NMPP) traverse une importante crise. Sa principale filiale, la société d’agence et de diffusion (SAD), chargée de renvoyer les journaux imprimés aux diffuseurs, marchands de presse et autres kiosquiers, accuse une perte d’exploitation de plus de 20 millions d’euros.

Un plan de sauvetage de 140 millions d’euros, relevé à 190 millions par la nouvelle PDG de Presstalis, Michèle Benbunan, est dans les rouages et prévoit une surtaxation des éditeurs de presse, des cessions d’actifs, un prêt de l’État et environ 200 suppressions d’emploi. Un énième plan de sauvetage (2007, 2009, 2012, 2013) pour Presstalis qui avait déjà supprimé la moitié de ses effectifs en 2012, rappelle Libération.

Sauver la presse indépendante

Cependant, en tentant de se sauver, Presstalis s’appuie sur des planches qu’il risque de couler. Ainsi, Canard PC, les éditions So Press (Society, So Foot, So Press, Pédale, etc.), Le Un, America et nombre de titres indépendants risquent la banqueroute, incapables de s’acquitter de cette « surtaxe » imposée par Presstalis sans plomber des comptes déjà fragiles pour certains.

L’exemple le plus frappant est celui de Canard PC, déjà passé d’hebdomadaire, à bimensuel aujourd’hui, et contraint à devenir mensuel demain. Le magazine en appelle à ses lecteurs via une campagne de crowfunding initiée pour sauver ses plumes.

Comme l’explique le magazine sur la page Ulule dédiée à cette opération, Presstalis distribue les magazines dans les différents points de vente, collecte les revenus issus des ventes puis les redistribue aux différents éditeurs après avoir ponctionné une importante commission, entre 40 et 50% pour Canard PC.

Des années de crise

Le 6 décembre, pour se sauver d’une quasi-faillite, Presstalis prend des mesures radicales et décide de prélever 25% de commission supplémentaire sur le chiffre d’affaires de tous les éditeurs pour les mois de décembre 2017 et janvier 2018, soit 75% des revenus de Canard PC !

« Presstalis a beau être une coopérative, ce sont les grands éditeurs qui sont les vrais décisionnaires au conseil d’administration, et les éditeurs de grands quotidiens y sont fortement représentés. Ennuyeux, car une bonne partie des difficultés actuelles réside justement dans les énormes coûts de distribution que ces mêmes quotidiens font peser sur l’ensemble de la filière », explique le magazine.

Pour sauver un système de distribution et de vente des journaux à bout de souffle, le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP), qui fixe les règles en matière de distribution, a décidé un prélèvement de 2,25% du CA des magazines pendant 5 ans et de l’ordre de 1% pour les clients de MLP .

Un sauvetage contesté

Une mesure, parmi d’autres, qui doit être validée par l’Autorité de régulation de la distribution de la presse et qui soulève la colère des petits éditeurs de presse décidé à faire entendre leur voix.

« On nous demande de participer à un plan et de financer des mesures soi-disant miracles, mais les personnes qui nous le demandent n’ont pas vu se former un trou de plusieurs dizaines de millions d’euros » chez Presstalis souligne Franck Annese, cofondateur de So Press à l’AFP.

Alors que le tribunal de commerce devait valider le plan de sauvetage de Presstalis ce lundi 12 mars, cinq éditeurs de magazines spécialisés, la Financière de loisirs (L’Écran fantastique, Graffiti art), Arxis presse, MGMP (Nexus), RPP et Rigel, viennent de déposer plainte contre la Coopérative des Magazines (CDM), actionnaire à 75% de Presstalis, devant le parquet national financier de Paris pour « présentation de faux bilan ».

Preuve s’il en fallait une que les conditions du sauvetage de Presstalis sont loin de faire l’unanimité dans le secteur et qu’il devient urgent de réformer le système de distribution.

Aujourd’hui encore, un marchand de journaux n’a pas la main sur les titres qu’il reçoit. Il ne peut pas en demander certains plus que d’autres, refuser des titres qui ne se vendent pas, ni choisir la quantité à livrer. Un frein hérité de la loi Bichet de 1947 que l’État entend, une nouvelle fois, réformer.

« Il faut repenser un système de réglementation devenu trop complexe, trop rigide, trop administré », assurait la ministre de la Culture Françoise Nyssen dans les colonnes du JDD en février dernier. Au moins sur ce point, tout le monde est d’accord…

https://twitter.com/GaspardKoenig/status/969869040918417408

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4 commentaires
  1. Qu’on lise ou pas ces magazines, c’est là une bien triste nouvelle.
    Je suis abonné à une demi douzaine de magazine bien qu’on entende souvent dire ‘on trouve la même chose sur le net’. Eh bien moi je préfère le format papier. Essayez de relire un magazine en pdf dans 20ans…

  2. Chacun ses préférences .Pour le pdf , on arrivait à le lire y a vingt ans , y a pas de raison qu’on y arrive pas dans 20 autres.

  3. La meilleure solution pour sauver les indépendants ? Passer à l’abonnement. Contrairement à ce que l’on croit, les journaux se font un peu plus de marge sur un magazine vendu par abonnement que sur un vendu en kiosque.
    Personnellement, je lis CPC depuis des années (depuis qu’il est passé en bimensuel) et je ne me suis jamais abonné. Là, vu le "racket" de Presstalis, je vais m’abonner histoire de soutenir CPC.

  4. Bien triste… La culture Buzz et du putaclic ont malheureusement pris une trop grande part, je regrette vraiment le bon vieux temps du vrai journalisme de revues informatiques généraliste ou spécialisées avec des extraits de code par example, ou un bon vieux PC Team avec son CD plein de goodies a découvrir qu’on n’aurait pas pu télécharger sans vendre un rein en dial-up!
    Et non, je n’ai pas d’idées non plus quant a une modèle idéal de vraie presse en ligne.
    La Pub & les sponso partenaire comme JdG ne semblent pas suffisants a en croire le grand nombre d’articles Buzz bâclés (mais je reste fidèle pour les autres articles et test de qualité, a nous de faire le tri!). Si l’avenir de la presse Internet est l’abonnement, quitte a payer, je préfère le format papier moins écolo, mais c’est une préférence personnelle.

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