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Avec The Push, Netflix veut vous pousser au meurtre

Jusqu’où est-on prêt à aller pour se sortir d’une situation inextricable ? Netflix tente l’expérience avec son nouveau programme, The Push. Le concept ? Manipuler les participants pour les inciter à commettre un meurtre.

 

Depuis l’apparition de Big Brother (Endemol) en 1999, la première émission du genre, la télé-réalité a été capable du meilleur comme du pire. On aurait tendance à dire, surtout du pire : enfermement, manipulations, concours de beauté de créatures relookées au bistouri, participants incités à boire, se droguer ou filmés en pleins ébats sexuels (Loana a tué le game dès la première émission en France), etc.

En 2017, c’est Game 2 Winter qui créait la polémique. Son principe ? Tout est permis pour survivre dans le froid sibérien : drogues, alcools, viols, violence, meurtres. À quelques jours de son commencement, le milliardaire russe à l’origine de l’émission, Evguéni Pyatkovski, expliquera qu’il s’agissait d’une blague : « C’était une intox, pour m’aider dans mes recherches sur le marché », AH. AH, donc. Toutefois, une télé-réalité serbe (Parovi), elle, n’avait pas fait dans la dentelle, cet ancien candidat de télé-réalité française – Zelko de Secret Story 5 – s’en souvient encore.

Pousse au crime

Au tour de Netflix de se jeter dans la bataille en jouant avec l’esprit des candidats. À la manœuvre dans The Push, Darren Brown, qui se décrit lui-même comme un « illusionniste psychique ».

Comme on peut le voir dans la bande-annonce du programme, le but est de plonger un candidat dans un scénario machiavélique où chacun des 70 acteurs aura son rôle à jouer pour inciter le candidat à pousser un vieil homme dans le vide, signant sa mort certaine.

Il faut qu’il ait l’impression qu’il n’y a aucune autre issue lorsqu’on lui dit de commettre un meurtre.

Toute l’expérience réside dans l’apparente réalité, la pression exercée par un contexte semble-t-il sans issue, sinon celle de l’irréparable.

L’expérience de Milgram version Netflix

« La question est simple, explique Darren Brown, la pression sociale peut-elle m’inciter à commettre un meurtre ? ». Pas besoin de regarder le show pour le savoir. La réponse est connue depuis longtemps : oui. Et encore oui. Qu’il s’agisse d’infliger des décharges électriques à un candidat que l’on ne voit pas, à chaque mauvaise réponse qu’il formule, ou de commettre l’irréparable. Les ressorts psychologiques à l’œuvre sont étudiés depuis belle lurette.

Le concept n’est pas nouveau et s’inspire de “L’expérience de Milgram” théorisée dans les années 60 par Stanley Milgram, psychologue à l’Université de Yale. L’idée était de recruter des sujets (homme et femme) pour évaluer leur degré d’obéissance à une autorité jugée légitime quand bien même il leur serait demandé d’effectuer des actes contraires à la morale ou heurtant leur propre conscience.

En l’occurrence, administrer des chocs électriques à une personne invisible – un acteur – qui crie, voire hurle de douleur à mesure que les décharges électriques montent en intensité. Plus de 60% des sujets menèrent l’expérience à son terme avec des chocs potentiellement mortels (450 volts), parce que l’autorité en blouse blanche l’exigeait. France 2 avait d’ailleurs transposé cette expérience dans “Le Jeu de la Mort” en 2010.

L’homme est un loup pour l’homme

Le résultat est sans appel, Milgram les qualifiait lui-même « d’inattendus et d’inquiétants », et fut fortement critiqué à l’époque, principalement pour des raisons éthiques et déontologiques. La tromperie peut-elle être une variable moralement acceptable et scientifiquement valide lors d’une expérience scientifique ?

Quoi qu’il en soit, The Push n’a aucune prétention scientifique, seulement celle de divertir sur la souffrance du participant. Ici, le candidat est mis face à deux choix : tuer ou aller en prison. On peut s’interroger sur les bienfaits d’une telle épreuve. Pour le spectateur, les ressorts sont toujours les mêmes, pour le participant manipulé en revanche, il se retrouvera bien seul face à sa propre conscience une fois la supercherie révélée.

Mais tant qu’il y aura des gens pour regarder… The Push, c’est le 27 février prochain sur Netflix.

https://www.youtube.com/watch?v=D3aShsV0HJw

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5 commentaires
  1. Je ne pense pas qu’on soit sur de l’expérience de Milgram. Ici il s’agirait plus de montrer comment l’influence de force extérieur influe sur nos choix, et que les notions de libre arbitre sont plus une illusion qu’autre chose.

    Ce type de show extrême peut être une occasion de montrer que n’importe qui dans des circonstances exceptionnelles peut devenir un meurtrier et qu’un meurtrier doit pouvoir beneficier d’un procès équitable pour qu’un jugement soit rendu eu égard des circonstances réelles du meurtre.

    Si ce genre de show arrive à combattre le jugement par l’emotion pourquoi pas

  2. Quand on aura des candidats qui, au choix, découvriront que tuer c’est facile ou qu’ils en sont capable et n’arriveront plus à ce regarder en face…

  3. Mais pitié mais boycottez moi ça … Je supplie vraiment et sincèrement tout le monde de ne pas accepter ça, arrêtons nos abonnements netflix, lançons des pétitions, …. C’est condamner un innocent! C’est condamner quelqu’un à la torture psychologique, à vivre tout le reste de sa vie avec tout ce que ce genre d’action réel ou non va engendrer. Et si ce n’est le geste lui même, l’état de détresse dans lequel on va le pousser pour qu’il en vienne à choisir l’acte final. Je ne trouve pas les mots pour essayer de convaincre! Je suis en pleure et en panique d’imaginer que ce soit réel!

  4. Pourquoi tout le monde s’offusque t-il ? Darren Brown procède à une expérience de psychologie sociale pour répondre à la question légitime qu’il se pose et que nous devrions tous nous poser : "la pression sociale peut-elle nous inciter à commettre un meurtre ?". Obtenir une réponse à cette question peut nous conduire à remettre en cause certains de nos préjugés, à reconsidérer la part de responsabilité d’une personne qui peut rapidement basculer dans la peau d’un meurtrier, à simplement nous ouvrir les yeux sur l’influence primordiale de l’environnement dans nos prises de décisions. Pour confirmer l’hypothèse que la pression sociale peut s’avérer suffisamment forte pour inciter une personne objectivement "normale" à commettre un meurtre en un laps de temps très court, seule l’expérience compte (je rappelle que la psychologie sociale est une science car elle établit des faits à travers les conclusions de ses expériences). Darren Brown met en place une expérience en utilisant certains mécanismes démontrés en psychologie sociale (pied dans la porte, effet du témoin, etc.) et apporte ici une conclusion qui par son côté stupéfiant, est une véritable avancée dans ce domaine des sciences humaines. Je pense que nous ne devrions pas être choqués par ce qu’a pu vivre le sujet "victime" de cette expérience : Tout d’abord parce que son témoignage en fin d’émission montre qu’il en est sorti quelque chose de positif chez lui : c’est son ressenti, et c’est le seul qui compte ! Le traumatisme que nous lui accordons en tant que spectateur n’est pas nécessairement un traumatisme vécu chez lui en tant que tel. Il passe évidemment par des phases de peur, de stress, de confusion mais cela n’est pas forcément traumatisant : Après une phase de debrief, Il a du très vite comprendre qu’il a été manipulé comme n’importe qui aurait pu l’être et qu’il a réagi comme la "norme". Et on peut légitimement penser que s’ils avaient très mal vécu l’expérience, tous ces sujets n’auraient pas accepté d’apparaître dans l’émission. Toutes les expériences en psychologie sociale "piègent" des personnes pour en analyser les comportements, c’est le principe même de l’expérience. Mais tout comme l’expérience de Milgram, elle permet de nous questionner sur notre "libre arbitre" et de porter un autre regard sur des comportements qui nous semblaient être commis par des personnes que nous ne pensions jamais pouvoir être. Et pour ceux qui sont choqués par le côté médiatique de l’expérience, cette émission souligne évidemment le côté spectaculaire dans une logique commerciale mais il n’en reste pas moins que sa diffusion à grande échelle permet de toucher un large public et d’éveiller les consciences, plus que ne l’aurait fait un livre poussiéreux rangé dans le rayon sciences humaines d’une bibliothèque de quartier. Et il ne faut pas non plus écarter l’hypothèse que les sujets peuvent eux aussi être des acteurs…ce qui ferait de nous les véritables sujets manipulés de cette expérience !

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