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La « spirale du silence » bâillonne aussi les réseaux sociaux

Une étude américaine tendrait à démontrer que les réseaux sociaux ont tendance à limiter la parole, et surtout les prises de positions des internautes sur les…

Une étude américaine tendrait à démontrer que les réseaux sociaux ont tendance à limiter la parole, et surtout les prises de positions des internautes sur les sujets sensibles, selon le média utilisé pour exprimer son opinion et l’interlocuteur qui leur font face, en ligne ou IRL.

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La tendance sur les réseaux sociaux mène à penser qu’ils sont le lieu tout trouvé pour relayer les informations futiles, commenter une actualité, raconter sa vie et LT les émissions hautement culturelles.
Ce n’est pas une fatalité. Le centre de réflexion américain, Pew Research Center (PRC), a mené une étude sur 1801 personnes aux États-Unis durant l’année 2013. Rendue publique le 26 août, cette étude analyse le phénomène de la « spirale du silence » dans le cadre des réseaux sociaux.

Développé par Elisabeth Noelle-Neumann en 1974, cette théorie de l’opinion publique – ou “Spirale du silence” – s’intéresse à l’influence des médias de masse et de l’opinion publique sur l’expression d’un point de vue. Sensible à son environnement social, un individu lambda sera plus enclin à partager son opinion sur un sujet donné, si celle-ci est similaire à celle du plus grand nombre et relayée par les médias de masse. Dans le cas contraire, par peur d’être marginalisé, un individu taira plus facilement ses opinions.

À l’ère des réseaux sociaux, en va-t-il de même ? Pour y répondre, le PRC a choisi une question d’intérêt publique : l’affaire Snowden et les révélations sur l’espionnage de masse de la NSA. Sujet épineux s’il en est dans la société américaine, puisqu’en 2013, 44% des personnes interrogées estimaient que la divulgation d’informations secrètes nuisait à l’intérêt général tandis que 49% pensaient l’inverse. Ces 1801 personnes hésiteraient-elles ou non à évoquer publiquement, en ligne ou IRL, leur avis personnel sur la question et quelle serait leur perception de l’opinion de leur entourage sous ces deux aspects ?

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Le constat est sans appel :
Les personnes sondées préfèrent débattre avec leur proche, de visu, plutôt que s’étendre sur les réseaux sociaux : 86% des Américains sont prêts à discuter en personne des programmes de surveillance de la NSA mais seuls 42% sont prêts à le faire sur Twitter ou Facebook.

Les réseaux sociaux ne représentent pas une plateforme de discussion alternative pour ceux qui n’étaient pas disposés à parler de l’affaire Snowden/NSA : sur 14% d’Américains qui ne souhaitent pas s’exprimer sur le sujet, seulement 0,3% sont prêts à le faire sur les réseaux sociaux.

– Que ce soit en ligne ou dans un cadre personnel, les personnes interrogées sont plus enclines à partager leur opinion si elles pensent qu’elle sera partagée par le public.

Les conclusions précédemment établies sur la « spirale du silence » s’appliquent donc également aux utilisateurs des réseaux sociaux : un utilisateur Facebook ou Twitter sera plus enclin à partager son opinion sur la plateforme s’il sait que les personnes constituant son réseau partagent son avis. Sur la question Snowden/NSA, ils sont deux fois plus à accepter de participer à une discussion Facebook sur le sujet.

Comme le souligne Big Browser, les médias sociaux encouragent à l’autocensure : un utilisateur moyen (sur la plateforme plusieurs fois par jour) est deux fois moins susceptible que les autres d’exprimer ses idées s’il suppose que ses amis Facebook ne sont pas du même avis que lui.

La prise de parole est donc encore conditionnée par l’opinion de l’autre mais surtout l’adhésion majoritaire au message transmis. Ce qu’on pourrait appeler, dans une certaine mesure, la dictature du like, du RT, je pense donc tu me suis, etc. Pourtant l’étude ne précise pas pourquoi ils décident de ne pas s’exprimer. Dans la « spirale du silence » c’est généralement la peur de l’isolement, mais aussi la peur de décevoir son entourage ou de générer des disputes inutiles.

Résultat à nuancer puisque l’étude montre aussi que certaines personnes choisissent délibérément de s’exprimer quand bien même leur opinion serait minoritaire et ce pour différentes raisons : confiance en leur connaissance sur le sujet, intensité de leur opinion et niveau d’intérêt pour le sujet, notamment.

Pour plus d’informations sur le sujet, l’intégralité de l’étude : Social media and the « spiral of silence »

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15 commentaires
  1. En même temps quand on s’exprime sur les réseaux sociaux comme fb si le sujet est sensible (politique, religions…) beaucoup d’autres utilisateurs (pas tous) qui ne partage pas votre opinion vous insulte facilement car cacher derrière leur pc. Ça donne pas envie de commenter des articles intéressants.
    Sans parler que les employeurs vos collègues vous voient/vous retrouve sur les réseaux sociaux donc par sécurité vos mieux éviter de s’exprimer sur des sujets sensibles ^^

  2. C’est pour ça que les imageboards (4chan en tête pour les non-japanophones) marchent bien sur ce genre de sujets épineux. On peut voir des immondices (on peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre), mais l’anonymat peut donner lieu à un débat intéressant, vu que la personne ne risque rien si elle donne son avis, même minoritaire, du moment qu’il est argumenté.

  3. Sur les réseaux sociaux un message est perçus instantanément par des dizaines, des centaines, voir des milliers de personnes en même temps.
    Lancé une opinion dessus reviens a lancé un avis politique pendant un repas de famille qui regroupe 10 générations.

    Trop de personnes pensent déjà qu’ils peuvent dire ce qu’il veulent sous couvert de liberté d’expression. L’anonymat n’est pas une solution, il protégerait ces individus et ferait probablement augmenter la quantités de propos juridiquement répréhensibles.

    Faire attention à ce qu’on dis en publique / sur les réseaux sociaux, ce n’est pas plus de la censure que du bon sens.

  4. c’est surtout le fait que chaque mots, chaque images postées sur le web le reste indéfiniment.
    je n’ai pas peur de dire des conneries IRL, par contre sur la toile, je retourne 7 fois mon clavier devant l’écran avant de valider !
    anonyme ou pas …

  5. La parole s’envole et les écris restent.
    Les gens commencent a comprendre qu’Internet est une archive et tout ce qu’on écrit dessus est publique et va y rester pour toujours.
    Le concept de la loi pour l’oublie numérique est gentil mais un peu irrealiste.

  6. Moi je m’en fous, j’ouvre ma gueule, je débats avec d’autres sur Facebook, et effectivement ça en gêne certains, et ça me cause parfois des problèmes ^^… Mais au moins c’est dit. On ne sait jamais à quel point on peut aider son prochain (et s’aider soi-même aussi en réalisant ces propres erreurs) en échangeant sur des sujets épineux…

  7. Moi je pense surtout que c’est parce que la majorité des gens qui s’expriment sur FB sont des crétins décérébrés qui ne postent que pour demander des vies à Candy crush, te demander de venir admirer leur ville sur Farmville ou commenter Secret Story.

  8. Je suis d’accord sur ce qui a été dit plus haut par rapport à l’anonymat. Quoiqu’on puisse en penser, sur 4chan (et assimilés) y’a du meilleur comme du pire.
    Mais le but des réseaux sociaux n’est pas l’anonymat, c’est justement de reproduire une partie ou la totalité des interactions sociales de la vraie vie de la réalité véritable (tant que faire se peut, évidemment). Je pense que le problème est plus “profond” que ça, vu qu’il vient de la société et de son fonctionnement en lui-même. Il faudrait éduquer les jeunes à pouvoir s’exprimer correctement, sans honte, et surtout à savoir écouter et ne pas être “extrême” dans les réactions. En bref, apprendre l’un des principes de base de la démocratie. Mais c’est dur d’apprendre ça quand on voit tous les jours à la télé ou qu’en entend à la radio des grandes personnes sérieuses et responsables s’engueuler parce que leurs avis divergent…

    @Sowyer: Ce que tu dis me laisse perplexe, pour ne pas dire que ça m’inquiète. Tu penses donc qu’il ne faut dire que des choses qui sont socialement ou politiquement acceptables? Ton avis nécessite-t-il l’approbation de la majorité pour qu’il soit connu, faute de quoi tu sera traité comme un fou, un paria, un dissident? La liberté d’expression c’est d’une part la possibilité de pouvoir dire ce qu’on veut, un peu quand on le veut, mais c’est aussi accepter les avis divergents. Et c’est ce second point qui fait défaut souvent (pour ne pas dire toujours). Alors oui, il y a manière et manière de dire les choses, et je pense qu’il faut faire preuve d’un minimum de respect envers la ou les personnes avec lesquelles on discute, mais on peut absolument tout dire, ça je te l’assure.

  9. L’anonymat est la seul solution, et c’est l’essence même d’internet.
    Curieusement cela n’amène pas tant de trolls qu’on pourrait le penser. Le tout venant est plus enclin a vraiment s’exprimer, alors que le troll de bas étage survit de toute façon de la même manière sur les réseaux “non-anonyme”.
    Au final et avec la masse de participants libres une certaine vérité se dégage, qui n’aurait pas pu émerger sur un réseau ou est présent son patron et sa grand-mère.

    Mais quoiqu’il en soit celui qui a vraiment une culture internet ne va plus sur Facebook ou Twitter.depuis longtemps.

  10. Cette spirale du silence pourrait-elle aussi s’expliquer en partie par la peur d’être considéré comme un troll?

    (Une opinion divergente a de bonnes chances d’être jugée “hors-sujet”, et par extension d’être de nature “trollesque”, non? )

  11. @Lumenis

    “Il faudrait éduquer les jeunes à pouvoir s’exprimer correctement, sans honte, et surtout à savoir écouter et ne pas être « extrême » dans les réactions”

    Toutes les réactions extrêmes ne sont pas mauvaises, certaines peuvent être salutaires. Sans compter que ce type de reactions traduisent l’intensité que l’on ressent pour le message que l’on porte. Lisser les esprits “un peu trop extrême” serait comme retirer les couleurs d’un paysage, ce serait triste. La plupart des gens finissent un jour ou l’autre par se discipliner d’eux même.

    Une jeunesse raisonable, sage et mesuré serait-elle vraiment préférable?

  12. Des articles de fond bien ficelés, c’est Elodie.

    Sur le JDG vous vous posiez il y a peu la question de la pertinence de l’anonymat sur votre forum : la réponse viens d’être apportée.

    Mieux vaut quelques dérapages et prises de becs que l’autocensure ; le système des likes permet tout de même de modérer les participants.

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