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Métavers : et si le fait de tuer un avatar devenait un véritable crime ?

Le haut dignitaire des Emirats Arabes Unis estime que les crimes sérieux devraient être proscrits dans le métavers exactement comme ils le sont dans la vie réelle.

Omar Sultan Al Olama, le ministre émirati de l’intelligence artificielle (oui, il s’agit bien de son titre officiel) prend son rôle très à coeur. Et lorsqu’il s’agit du métavers, l’intéressé a des idées très tranchées, et certaines laisseront probablement les observateurs sceptiques. C’est le cas de son positionnement sur la criminalité dans cet espace virtuel; pour le ministre, les gens qui se rendraient coupables de “crimes sérieux” dans le métavers devraient en subir les conséquences pénales dans la vie réelle.

Certes, le concept de responsabilité pénale dans le cyberespace n’est pas entièrement nouveau. Chacun sait aujourd’hui que le comportement des internautes peut avoir des conséquences bien réelles sur la vie des personnes concernées. Ces dernières années, nous avons ainsi assisté à l’émergence de nombreuses initiatives citoyennes ou gouvernementales qui visent à mettre les cyberagresseurs face à leurs responsabilités.

Mais ici, Al Olama ne fait pas référence à du cyberharcèlement, à un piratage ou quoi que ce soit de ce type. Pour lui, même des actions purement symboliques sans conséquences concrètes dans le monde réel, comme le fait de tuer l’avatar de quelqu’un d’autre dans le métavers, devrait être considéré comme un crime à part entière.

Crime 100% virtuel, impact psychologique bien réel ?

Si je vous envoie un texto sur WhatsApp, c’est un texto, n’est-ce pas ? Ça pourrait vous terroriser, mais en un sens, cela ne créera pas de souvenirs qui vont générer des troubles de stress post-traumatique”, explique le ministre cité par CNBC. “Mais dans un monde aussi réaliste que celui dont on parle avec le métavers, si je vous assassine… cela mène vers un certain extrême contre lequel il faut lutter de façon agressive, car tout le monde s’accorde à dire que certaines choses sont inacceptables”.

Décidément, le ministre a réussi à intégrer de nombreux points litigieux dans cette saillie relativement courte. Passons sur le fait qu’un simple texto peut également être infiniment traumatisant en fonction de son contenu, et tentons d’explorer le fond du problème.

En substance, il considère que les principes moraux et codes de conduite de la vie réelle devaient s’appliquer en toutes circonstances, même dans un monde virtuel qui ne constitue finalement qu’une extension de la réalité. Devrais-je donc aller dénoncer mon voisin de palier qui m’a écrasé sur GTA Online pas plus tard qu’hier soir ? Faut-il juger tous les joueurs de Pokémon pour trafic d’espèces animales protégées ?

La violence numérique, l’humain la connaît déjà très bien. © Rockstar

Les humains sont déjà à moitié numériques et savent faire la part des choses

Même s’il y a peu de chances que ce ministre émirati cautionne le contenu du titre de Rockstar, ou qu’il admette l’existence du bestiaire de Nintendo, son raisonnement semble se limiter strictement au métavers pour son côté ultra-réaliste et immersif. Il est indiscutable que lorsqu’il arrivera, le premier “vrai” métavers plus ou moins photoréaliste pourra bouleverser nos habitudes et notre rapport à la technologie. Mais de là à considérer le meurtre d’un avatar virtuel comme un véritable homicide … ?

Cela semble tout bonnement aberrant. Dans un premier temps, rappelons que Meta et les autres entreprises qui travaillent sur un système similaire le font dans un but commercial. Par définition, ces marques doivent absolument rester tout-public; il est donc inconcevable qu’elles décident activement de transformer leur futur univers virtuel en véritable serveur GTA Online à l’échelle de la planète. Et même si c’était le cas, notre monde digital est désormais suffisamment mature pour permettre au public de faire la part des choses.

Les humains d’aujourd’hui baignent constamment dans un monde virtuel. Certes, le métavers promet de faire passer ce concept à la vitesse supérieure, mais la plupart des codes resteront finalement les mêmes. Or, les joueurs s’entretuent déjà par avatars interposés depuis de longues années dans la joie et l’allégresse, et dans la majorité des cas, ce geste n’est en aucun cas interprété comme un agression dans le monde réel !

L’émergence des premiers “vrais métavers” va probablement avoir des répercussions réglementaires et législatives. © Conny Schneider – Unsplash

Une révolution virtuelle qui ne s’arrêtera pas au cyberespace

Mais d’un autre côté, cela ne signifie pas que tout le raisonnement du ministre est à balayer d’un revers de la main. Car ses propos ont au moins eu le mérite d’illustrer un point très important : le développement de cet univers parallèle numérique va forcer les législateurs à s’adapter, et il vaut mieux y réfléchir dès aujourd’hui avant de se retrouver dans un immense cul-de-sac sociétal, culturel et réglementaire.

On peut d’ailleurs déjà se demander qui fera la loi dans ce, ou plutôt ces métavers puisque Meta n’est pas le seul à travailler dessus. L’entreprise aura évidemment son mot à dire, mais qu’en est-il des gouvernements et des régulateurs ? Pourront-ils faire appliquer les lois en vigueur dans leurs propres juridictions ? Juridiquement parlant, faudra-t-il considérer ces espaces comme des extensions de la vie réelle à tous les niveaux ? Différentes réponses à ces questions pourront-elles générer des frictions entre certaines institutions, comme entre la Big Tech américaine et l’Union européenne par exemple ?

Autant de questions auxquelles nous sommes encore bien incapables de répondre pour l’instant, et il ne s’agit pourtant que de la pointe émergée d’un immense iceberg numérique. Autant dire que même si le métavers en lui-même ne vous intéresse pas en tant que tel, il sera intéressant de suivre son développement, car il va probablement entraîner une transformation profonde du paysage numérique tel qu’on le connaît, avec tout ce que cela implique pour la vie des humains de chair et de sang.

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Source : CNBC

3 commentaires
  1. Evidemment on pourrait, je ne sais pas moi, utiliser de l’argent réel pour se sortir de ces crimes virtuels? Mais n’importe quoi…

  2. je pense qu’il faut différencier les univers numériques : ceux qui sont avant tout des jeux comme gta online et autres mmorpg où le crime fait parti du jeu voir les tribunaux et prisons du mmorpg Archeage et les nouveaux metavers avec une connexion monétaire avec le réel , pour ces derniers il suffit juste d’interdire la mort de l’avatar d’une façon technique ainsi que le vol comme l’on peut le faire dans Black Desert Online

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