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Une pilule vibrante pour lutter contre l’obésité

Des chercheurs ont développé une pilule qui active des récepteurs musculaires autour de l’estomac pour réduire l’appétit. Il pourrait s’agir d’une alternative aux interventions chirurgicales lourdes qui sont utilisées pour traiter l’obésité morbide.

Des chercheurs américains ont mis au point un nouveau dispositif étonnant : une pilule un peu particulière qui ne libère aucun composé chimique. À la place, elle contient un petit moteur qui lui permet de vibrer sur place. Ses concepteurs estiment qu’elle pourrait participer à la lutte contre l’obésité qui fait des ravages au pays de l’Oncle Sam et dans d’autres régions du monde.

L’idée peut paraître saugrenue, mais elle est pourtant basée sur des mécanismes physiologiques très bien documentés. Lorsque l’estomac se remplit, l’étirement de sa paroi stimule un certain nombre de récepteurs mécaniques qui envoient à leur tour un signal au cerveau, et plus spécifiquement à l’hypothalamus.

Des vibrations pour simuler un ventre plein

Cela indique à l’organisme que de la nourriture a été ingérée, et qu’il est temps d’activer les autres mécanismes qui participent à la digestion. Mais cela se traduit aussi par la mise en circulation de plusieurs hormones, comme les peptides YY, qui participent à la sensation de satiété. À l’inverse, le taux de ghréline — une hormone qui stimule l’appétit — baisse rapidement. Ces mécanismes de régulation permettent d’éviter à un organisme de se faire littéralement exploser la panse en ingérant plus de nourriture que l’estomac ne peut en contenir.

Ce sont ces phénomènes dont les chercheurs espèrent tirer part. Leur approche se base sur de précédentes études qui ont montré que le fait de faire vibrer des muscles pouvait stimuler les mécanorécepteurs. Ils ont donc voulu vérifier si ce constat était aussi valable pour les récepteurs de l’estomac à l’origine de cette chaîne de réactions.

« Je me suis demandé si nous pouvions activer les récepteurs en les faisant vibrer pour leur donner l’impression que l’estomac s’est étendu, créant ainsi une illusion susceptible de moduler la production d’hormones et la façon de s’alimenter », explique Shriya Srinivasan, bio-ingénieure à Harvard et auteure principale de l’étude.

Des résultats expérimentaux probants

Pour y parvenir, ils ont conçu cette pilule vibrante baptisée VIBES. La capsule, qui est alimentée par une petite batterie à l’oxyde d’argent, est couverte d’une membrane gélatineuse qui se dissout au contact des sucs gastriques. Cela a pour effet de compléter un circuit électrique qui déclenche un petit moteur vibrant.

Pour tester la viabilité du dispositif, ils l’ont fait ingérer à des cochons une vingtaine de minutes avant de leur donner de la nourriture. En parallèle, ils ont contrôlé le taux des différentes hormones impliquées dans le processus pour vérifier si VIBES déclenchait une réaction comparable à celle que l’on observerait typiquement après un gros repas.

Et l’expérience a produit de beaux résultats. Le paysage hormonal était comparable à celui d’un animal rassasié, et en moyenne, les cochons qui ont ingéré la pilule ont consommé environ 40 % de nourriture en moins que les autres. Ils ont aussi pris moins de poids sur la durée. « Le changement comportemental est profond », expliquent les auteurs.

Après l’expérience, la pilule a traversé le reste du système digestif sans problème avant d’être excrétée quatre ou cinq jours plus tard, sans le moindre signe d’obstruction, de perforation, ou d’autre problème. Mais les chercheurs explorent déjà des manières de la modifier pour qu’elle demeure plus longtemps dans l’estomac. Elle pourrait ainsi être activée ou désactivée à distance au moment opportun.

Une alternative potentielle à la chirurgie

Pour l’instant, il ne s’agit que d’une preuve de concept, encore très loin d’une solution thérapeutique mature qui pourrait être utilisée sur des humains en l’état. Mais les auteurs de l’étude estiment que c’est une idée qui mérite d’être explorée. Car sur le papier, cette approche présente des avantages assez intéressants dans la prise en charge des troubles de l’alimentation et de l’obésité qui peuvent en découler.

En effet, lorsque les méthodes initiales basées sur le régime et l’exercice ne produisent pas les résultats attendus, les patients doivent parfois avoir recours à des thérapies médicamenteuses injectables. Leur prix souvent élevé a tendance à les rendre inabordables, en particulier pour les populations les plus démunies. Dans les cas les plus extrêmes, d’autres subissent des interventions chirurgicales lourdes comme la pose de bypass gastriques, des dispositifs qui permettent de court-circuiter une partie de l’estomac. Cette technique produit généralement des résultats impressionnants, mais parfois au prix d’autres conséquences non négligeables sur la santé.

Dans ce contexte, une pilule vibrante pourrait représenter une alternative moins invasive et bien plus abordable, avec un potentiel considérable en termes de santé publique. « J’aimerais voir comment cela pourrait transformer la prise en charge globale des personnes qui n’ont pas accès aux options plus chères ou sophistiquées », indique Srinivasan.

Les chercheurs espèrent pouvoir le vérifier prochainement lors d’un essai clinique, une fois qu’ils auront développé une pilule plus adaptée au corps humain et conforme aux règles de santé publique.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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Source : MIT

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