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Un « champignon zombie » façon The Last of Us identifié en Écosse

Cette espèce plutôt rare, mais ô combien mémorable illustre la grande diversité de l’ouest écossais, que de nombreux volontaires essaient de documenter et de protéger.

La forêt dense qui recouvre l’ouest de l’Écosse abrite des tas d’espèces parfois très étonnantes. En cherchant à les cataloguer, le naturaliste amateur Ben Mitchell a fait une découverte pour le moins inattendue : selon le Times, il est tombé nez à nez avec un champignon appelé Gibellula, un représentant de la famille des Cordycipitacées. Si ce nom vous rappelle quelque chose, c’est parce qu’il s’agit des fameux « champignons zombies » qui sont notamment au centre de l’intrigue de la franchise The Last of Us.

La particularité de ces champignons, c’est que ce sont des parasites, et plus spécifiquement des entomopathogènes — des formes de vie biologiquement armées pour infecter des insectes ou des arthropodes, comme les araignées (selon les espèces). Et même s’ils sont loin d’être aussi menaçants que ceux de la série et des jeux, ils se distinguent tout de même par leur cycle de vie aussi fascinant que cauchemardesque.

Un film d’horreur biologique

Pour assurer sa descendance, l’ancêtre commun de ces champignons a développé un stratagème si alambiqué qu’il semble tout droit sorti de la fiction : il pirate le système nerveux de ses cibles pour les transformer en « zombies », et maximiser la propagation de ses spores.

Lorsqu’une pauvre bête (généralement une araignée pour Gibellula) se retrouve exposée à des spores, ces dernières commencent à germer et à émettre ce qu’on appelle des filaments mycéliens. Fonctionnellement, on peut les considérer comme les racines des champignons, même s’il s’agit d’un gros abus de langage. Lentement, mais sûrement, ces filaments prennent le chemin du système nerveux central. Et lorsqu’ils y parviennent, on assiste au début d’un véritable film d’horreur animalier.

Les cellules fongiques commencent alors à former un réseau en trois dimensions autour du cerveau. Il s’agit d’un mécanisme absolument fascinant d’un point de vue biologique, car le champignon n’attaque pas (encore) la structure nerveuse. À la place, il l’enveloppe délicatement pour prendre le contrôle de l’animal. À partir de ce moment, on peut considérer ce dernier comme un zombie, et pour cause : il ne contrôle plus son propre corps. À la place, c’est ce marionnettiste fongique qui tire les ficelles et reprogramme entièrement ses instincts naturels.

La phase suivante, la plus impressionnante, peut varier significativement en fonction de l’espèce exacte du champignon et de sa victime — mais le grand principe reste globalement le même chez tous les cordycipitacées. Une fois bien installé, le champignon pousse son hôte à se diriger vers un endroit bien visible, exposé et souvent en altitude (sur la feuille d’une plante, par exemple). Il procède alors à une dernière manipulation du système nerveux, et force son hôte à se cramponner à son support par tous les moyens possibles. Et malheureusement pour la victime, elle n’en bougera plus jamais.

Les particules blanches qui émergent de cette “mouche-zombie” sont des spores en formation. Elles permettront à une autre espèce, Entomophthora muscae, de démarrer un nouveau cycle. © cobaltducks – iNaturalist

Car à partir de là, le champignon se livre à un dernier assaut qui va sonner le glas de sa funeste marionnette. Il se met à consommer tous les tissus vivants de l’hôte pour entrer dans une phase de croissance rapide jusqu’à ce que le cadavre déborde complètement de conidies, de vraies petites usines à spores.

C’est à ce stade que l’emplacement stratégique du zombie joue un rôle important. Puisque l’insecte est généralement mort en hauteur, ces spores sont transportées au gré du vent afin de toucher d’autres bestioles, répétant ainsi l’intégralité du cycle.

Certaines espèces de cordycipitacées ajoutent même de petites touches encore plus abominables à leur mode opératoire. Par exemple, en 2021, des chercheurs danois ont identifié une espèce qui profite aussi de la contamination pour concocter un puissant aphrodisiaque (voir notre article).

Si un partenaire potentiel passe à proximité, il est pris de pulsions irrésistibles — si irrésistibles, en fait, que le pauvre bougre ne distingue même plus un animal vivant d’un animal mort. Subjugué, le mâle se rue alors sur le zombie — un choix bien mal avisé, comme de nombreuses autres décisions prises sous l’influence d’une pulsion. Car dès l’instant où le pauvre mâle entre en contact avec le cadavre, il s’expose à son tour aux spores du champignon, avec les conséquences funestes que l’on connaît.

Un beau porte-drapeau de la biodiversité locale

La bonne nouvelle, c’est que ces espèces ne représentent généralement aucun danger pour les humains en bonne santé, comme nous le racontons dans un dossier paru après la sortie de la série The Last of Us.

Pour Ben Mitchell, communiquer sur cette espèce fascinante est avant tout une manière d’attirer l’attention sur les différentes initiatives qui visent à cataloguer et protéger la biodiversité de la forêt écossaise. Il semble très investi dans cet effort, et se réjouit d’être tombé sur une perle rare susceptible d’offrir beaucoup de visibilité à sa cause.

« Il n’y a eu qu’une dizaine de mentions de Gibellula en Écosse sur les 70 dernières années environ. Maintenant, je peux en ajouter deux à ce total », se réjouit-il dans son interview au Times. « Cela montre à quel point notre forêt est riche, mais aussi à quel point il est important d’y aller et de simplement observer et enregistrer la faune. On ne sait jamais vraiment ce que l’on va trouver ensuite ! »

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