Passer au contenu

Des chercheurs ont séquencé l’ADN d’anciens habitants de Pompéi

Les ruines de la ville engloutie par le Vésuve sont un terrain de jeu sans équivalent pour les chercheurs qui continuent d’y faire de superbes découvertes.

Une équipe de chercheurs qui étudie les dépouilles des habitants de Pompéi est parvenue à extraire de l’ADN mitochondrial d’un homme et d’une femme pétrifiés dans la roche lorsque la ville a été engloutie par le Vésuve en l’an 79. C’est la toute première fois que le génome mitochondrial d’une victime humaine de la catastrophe est ainsi séquencé.

Les deux individus, recroquevillés dans les coins de leur bâtisse, avaient probablement tenté d’échapper à la fournaise qui dévalait les flancs du volcan. Malheureusement, la nuée pyroclastique n’a fait qu’une bouchée des pauvres hères; comme tous leurs semblables, ils se sont retrouvés pétrifiés à tout jamais dans un cercueil de cendres surchauffées.

Après 2000 ans de sommeil placide sous ce linceul de roche, les chercheurs ont été assez impressionnés par l’état de conservation des deux individus. “Cela avait l’air prometteur, donc nous avons décidé de tenter notre chance avec une extraction d’ADN”, explique Gabriele Scorrano, auteur principal de l’étude.

Ils ont donc prélevé un minuscule échantillon d’os qui s’est avéré être un vrai petit coffre aux trésors. Grâce à l’évolution des techniques de séquençage, les chercheurs ont pu dresser un portrait génétique très précis à partir d’un échantillon extrêmement petit – une problématique toujours très importante puisqu’il s’agit de vestiges historiques inestimables qui doivent évidemment être préservés autant que possible.

L’ADN mitochondrial, un coffre aux trésors paléogénétique

En l’occurrence, il s’agissait d’un type un peu particulier d’ADN; on parle d’ADN mitochondrial. Comme son nom l’indique, on le trouve dans les mitochondries, des petits organites qui permettent aux cellules de produire de l’énergie. Or, ces mitochondries étaient à l’origine une forme très primitive de bactérie. Elles sont arrivées dans les cellules dans le cadre d’un processus que l’on appelle endosymbiose; très vulgairement, cela signifie que les deux micro-organismes ont fusionné pour “coopérer” et ainsi augmenter leurs chances de survie respectives.

Les mitochondries sont avant tout des organites producteurs d’énergie; mais ce sont aussi de petits coffre-forts qui contiennent un ADN particulier très intéressant pour les chercheurs. © Louisa Howard — Dartmouth College — Wikimedia Commons

Or, ces mitochondries n’ont pas entièrement renié leur patrimoine génétique; elles disposent encore de leur propre génome composé d’ADN mitochondrial. Sans entrer dans le détail, celui-ci présente de nombreuses particularités — à commencer par le fait qu’il n’est transmis que par la mère.

Ces particularités rendent l’ADN mitochondrial extrêmement utile dans différentes disciplines, en particulier pour les biologistes qui travaillent sur l’évolution. Son étude est aussi un superbe outil dans le cadre de travaux sur la génétique des populations. Par rapport à l’ADN classique, l’ADN mitochondrial jouit d’une résistance inouïe à la dégradation; il peut donc braver les assauts du temps et renseigner les scientifiques sur l’historique d’un individu avec une précision parfois étonnante.

En comparant les résultats avec plus de 1000 autres échantillons d’ADN ancien et environ 500 échantillons contemporains, les chercheurs en ont déduit que les ancêtres de l’homme venaient d’Anatolie, soit en Turquie contemporaine. Sa lignée aurait ensuite migré vers la région de Rome, avec des liens du côté de la Sardaigne. D’après les chercheurs, cette seule observation confirme à elle seule que l’Italie était un patchwork culturel très diversifié à l’époque de l’Empire romain.

Un pauvre bougre paralysé par la maladie

Ce prélèvement d’ADN mitochondrial a aussi permis de fournir une explication au positionnement curieux des dépouilles. En effet, alors que la plupart des habitants ont été cueillis en pleine fuite, ce n’était pas le cas ici; les deux intéressés étaient avachis dans une position qui, selon les chercheurs, ne témoigne pas d’une volonté de fuir. Auraient-ils été cueillis à froid pendant leur sieste ? Difficile à dire, mais les chercheurs suggèrent qu’ils auraient essayé de se cacher, car ils n’auraient tout simplement pas été capables de fuir.

En effet, leur analyse de l’ADN mitochondrial a permis de déterminer que l’un des deux résidents était très, très malade. Il souffrait d’une spondylodiscite plus connue sous le nom de Mal de Pott. C’est une infection extrêmement grave qui est causée par Mycobacterium tuberculosis, un bacille qui — vous l’aurez deviné — est déjà responsable de la tuberculose.

Au même titre que le Colisée de Rome, Pompéi fait partie des vestiges les plus remarquables de l’illustre Empire romain. © David Libeert

Dans le cas d’une spondylodiscite, il vient se loger dans les disques intervertébraux. Ce sont les structures cartilagineuses qui servent à la fois de joints et d’amortisseurs tout le long de la colonne vertébrale. Ils sont indispensables au maintien de la posture et à la mobilité; lorsqu’ils ont endommagé, cela donne lieu à ces fameuses hernies discales qui peuvent faire souffrir le martyre.

Aujourd’hui, cette infection est considérée comme une urgence médicale; elle nécessite une prise en charge très rapide par des professionnels qualifiés. Mais il faut aussi que le patient s’astreigne à un traitement par antibiotiques extrêmement lourd qui peut souvent durer une année entière ! Or, dans le Pompéi du premier siècle, les malades n’avaient pas accès à ces traitements modernes. Ils devaient donc composer avec une douleur insupportable. Et souvent, la maladie évoluait vers une paraplégie et des abcès potentiellement mortels. Un tableau clinique dramatique qui aurait empêché l’intéressé de prendre ses jambes à son cou; pour cette personne, il n’est pas impossible que la nuée ardente ait été une sorte de délivrance.

Une photographie de la Rome antique

En résumé, l’analyse de ce tout petit échantillon aura dévoilé plusieurs éléments intéressants. Les chercheurs espèrent donc pouvoir réitérer l’expérience en soumettant d’autres prélèvements à ces nouvelles techniques de séquençage. Et le jeu en vaut la chandelle. Car Pompéi, en substance, c’est un peu comme un Polaroid de l’époque romaine.

Le temps d’un flash émis par le Vésuve, c’est une journée typique de l’Empire qui a été figée dans le temps. Pompéi, c’est donc une fenêtre sensationnelle pour étudier le quotidien d’une des civilisations les plus fascinantes de l’Histoire. Il sera donc intéressant de suivre l’évolution de ces séquençages, car ils révéleront sans aucun doute de nouveaux détails sur le quotidien de Pompéi, et par extension, de l’Empire romain en général.

🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.

Source : BBC

4 commentaires
  1. De quoi laisser pantois la nouvelle dégénération de nationaliste de race blanche !!! 😂💩😂😊

  2. Salut, n’en déplaise aux moeurs actuelles mais à cette époque les Grecs étaient d’origines caucasiennes, c’est à dire blancs et pour la plupart blonds. On le sait d’une part grâce aux riches récits qui nous ont été légués, d’Homere à Aristote et j’en passe, d’autres part aux sculptures, mosaïques et autres œuvres artistiques retrouvées. Ils décrivaient avec beaucoup de détails la couleur de peau de chacun et leur apparences physique. Peu de mélange ethniques se faisait à cette époque, et on peut dire qu’ils avaient une approche assez raciste sur la question, considérant les gens à la peau plus sombre comme des êtres inférieurs.
    Quand aux Romains de cette époque, nous avons beaucoup plus de témoignages qui nous sommes parvenus, notamment d’Auguste ou Néron, et des mosaïques comme de la Villa Romana d’El Casele. D’une manière générale, c’etaient des sociétés profondément racistes, que l’on pourrait qualifier aujourd’hui de nazi sans trop de peine. Heureusement les choses ont bien évolués et dans le bon sens ^^
    Alors pourquoi actuellement les populations dans le bassin méditerranéen sont ils plus foncés, et bien les conquêtes arabes sont passés par là ! Super sujet historique d’ailleurs, aussi riche en culture et passionnant 🙂

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *