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Unity : l’affaire du Runtime Fee devient de plus en plus sordide

Entre les manoeuvres commerciales très agressives et des accusations de chantage anticoncurrentiel sur fond d’insider trading, la cote d’Unity a pris du plomb dans l’aile ces derniers temps.

Unity, l’entreprise à l’origine du moteur Unity Engine dont dépend une grande partie des écosystèmes indépendants et mobiles, subit un feu nourri de critiques depuis l’annonce de la modification de son modèle commercial.

Non seulement les développeurs des jeux les plus populaires vont désormais devoir payer une licence Industrie à 5000 $ par an et par siège, contre 1500 $ pour la licence Pro en vigueur jusqu’à présent, mais ils vont également devoir s’acquitter du Runtime Fee. Cette nouvelle clause stipule que le studio devra mettre la main au portefeuille à chaque fois qu’un joueur installera l’un de leurs produits.

Sans surprise, l’annonce a été vécue comme une exaction, voire une véritable mise à mort du côté des studios et des développeurs. Nombre d’entre eux ont passé des années à concevoir un jeu et un business plan centré autour d’Unity Engine, et se retrouvent désormais avec le couteau sous la gorge.

Et plus le temps passe, plus les détails les sordides de cette affaire commencent à peine à émerger. Si l’on en croit un rapport de mobilegamer.biz, cette manœuvre commerciale difficile à avaler aurait en fait un objectif caché : tuer son principal concurrent dans le domaine de la publicité.

Rafler le pactole de la monétisation

À l’exception des microtransactions, les annonces publicitaires dans les jeux vidéo sont souvent la seule façon pour un développeur indépendant de dégager un bénéfice, ou simplement de rester dans ses frais pour maintenir un service à flot sur la durée. Même si certains en abusent outrageusement, la réalité est que la quasi-totalité des jeux free-to-play doivent leur existence à ces réclames.

Dans l’écosystème Unity, c’est l’entreprise AppLovin qui s’est imposée comme le leader de la monétisation. Elle propose de nombreux services qui permettent aux développeurs de rentabiliser leurs productions en y intégrant des publicités ou des achats in-game. C’est un marché énorme. Et grâce à sa position dominante, AppLovin dégage des bénéfices considérables… à tel point qu’elle a même tenté de racheter Unity pour près de 20 milliards de dollars en 2022 !

Et apparemment, les décisionnaires d’Unity comptent tout faire pour s’accaparer cette manne. D’après mobilegamer.biz, l’entreprise aurait approché plusieurs studios avec une offre qui n’a pas tardé à être qualifiée de « chantage ».

Elle leur aurait proposé de supprimer entièrement ce fameux Runtime Fee, qui peut représenter plusieurs millions de dollars pour les jeux les plus populaires… à condition qu’ils abandonnent AppLovin au profit de LevelPlay, l’offre de monétisation d’Unity. « En résumé, Unity dit : “migrez vers LevelPlay, ou vous devrez nous payer une montagne d’argent” », résume crûment Matej Lancaric, un consultant interviewé par le site.

John Riccitiello au coeur des critiques

Et cette véritable clé de bras n’est pas le seul élément qui a fait froncer les sourcils des observateurs cette semaine. John Riccitiello, le PDG de la firme, s’est aussi illustré avec des manœuvres suspectes.

Il ne jouissait déjà pas d’une cote de popularité énorme. Pour rappel, c’est lui qui était PDG d’Electronic Arts lors du scandale des loot boxes de FIFA 09. En 2011, il a à nouveau ulcéré le monde du gaming après la publication d’un clip enregistré lors d’une réunion d’actionnaires. Il avait lâché un exemple de très mauvais goût  pour illustrer sa philosophie de monétisation.

« Quand vous êtes dans une session de six heures de Battlefield et que vous arrivez à court de munitions, si on demande un dollar pour recharger, vous n’allez pas réfléchir longtemps au prix à ce stade », avait-il expliqué. Un raisonnement qui en dit long sur sa vision de l’industrie du jeu vidéo.

Et cette semaine, “Ricci” a encore frappé. Selon Yahoo Finance, il a discrètement vendu plusieurs milliers de ses actions peu avant ce changement de modèle commercial controversé qui a gravement entaché la réputation de l’entreprise, pour un total de quelques dizaines de milliers de dollars. Une manœuvre qui a suscité des accusations de délit d’initié. Selon les registres de la SEC, le gendarme financier des États-Unis, il aurait aussi vendu pour près de 100 millions de dollars d’actions Unity depuis son arrivée au poste de dirigeant.

Malgré ces controverses, les personnes concernées risquent d’avoir du mal à obtenir des explications. Selon cet article de Bloomberg, Riccitiello était censé répondre aux questions des employés et des développeurs lors d’une réunion publique ce jeudi. La rencontre a finalement été annulée pour cause de « menaces de mort ».

Mais des doutes ont émergé quant à la crédibilité de ces menaces. Certains observateurs ont interprété cette annulation comme une manière d’esquiver des échanges qui s’annonçaient houleux. Il est très difficile de faire la part des choses ; mais si les menaces de mort sont évidemment injustifiables et intolérables, ce qui est sûr, c’est que Riccitiello n’a pas l’air pressé de s’expliquer sur cette affaire qui met l’industrie du jeu vidéo à feu et à sang.

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Source : mobilegamer.biz

11 commentaires
  1. Sauf que l’expression c’est “du plomb dans l’aile” et non dans l’air.
    Je pense que c’est ce que voulais notifier BiBenDuM

  2. C’est incroyable.
    Je sais pas si c’est Unity qui mérite de couler ou son patron qui doit arrêter de toucher aux boites de jeux vidéos.
    En tout cas j’espère que ce type finira à la rue.

    C’est quand même incroyable, il a reçu une offre d’achat de AppLovin et il s’est dit “ah ouais ils brassent plus que nous, c’est nous qui devrions les racheter” et voilà comment une fois de plus, l’argent a fait perdre la tête d’écervelés.

    Unreal a déjà le vente en poupe mais alors là toutes les étoiles sont alignées. Ils vont gagner des studios mais aussi surement des ingés de chez Unity qui ne sont pas d’accord avec la politique de leur boite.

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