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OpenAI signe un accord historique avec le groupe de presse Axel Springer

Axel Springer a ouvert la boîte de Pandore en permettant à ChatGPT d’exploiter ses articles de presse. Un tournant majeur dans l’histoire de l’IA qui pourrait ouvrir la voie à une grande transformation du monde des médias.

Le 13 décembre, le groupe de presse allemand Springer a signé un contrat historique avec OpenAI, le géant américain de l’intelligence artificielle. Avec ce partenariat, l’entreprise de Sam Altman compte permettre à ChatGPT, son agent conversationnel dopé au machine learning, de répondre sur des sujets d’actualité. Une démarche témoigne de la transformation rapide de l’écosystème médiatique avec la montée en puissance de cette technologie.

Sur le papier, ce partenariat permettra de combler l’une des lacunes les plus importantes de ChatGPT. Jusqu’à très récemment, il n’était entraîné que sur des données antérieures à 2021. Cette date butoir a récemment été étendue au printemps 2023, mais le problème reste le même : l’algorithme n’est pas capable de réagir à des actualités fraîches. Il faut systématiquement attendre que ses concepteurs collectent des données, qu’ils vérifient tant bien que mal leur pertinence, puis qu’ils les intègrent à la version publique du modèle lors d’une mise à jour.

Mais désormais, le chatbot sera bien plus à même de répondre à ces questions d’actualité. Il pourra s’appuyer directement sur les publications des différents médias du groupe. Par souci de transparence, le chatbot intégrera systématiquement un lien vers la source exploitée.

Une précaution indispensable pour permettre au public de tenir compte des spécificités de chaque média. En effet, le groupe Axel Springer est un patchwork de publications aux affiliations politiques et aux lignes éditoriales très variées. On peut citer Die Welt, un des plus gros journaux allemands qui est généralement considéré comme une source fiable, mais aussi Bild, un tabloïd sulfureux qui a extrêmement mauvaise réputation de l’autre côté du Rhin. Plus récemment, Axel Springer a aussi fait l’acquisition de Politico ou encore du Business Insider.

Un changement de modèle économique radical

En contrepartie, le plus grand groupe de presse d’Allemagne va toucher un énorme pactole. D’après une source proche du dossier citée par le Financial Times, il sera rémunéré à hauteur de plusieurs dizaines de millions de dollars par an, en plus d’une somme forfaitaire pour l’exploitation de tous les articles déjà publiés — une manne financière très importante qui pourrait complètement changer la façon de travailler des journalistes.

Le groupe Axel Springer ne cache d’ailleurs pas ses intentions à ce sujet. Il fait partie des structures qui ont déjà commencé à expérimenter avec l’intelligence artificielle dans le cadre de l’activité journalistique. « Nous voulons explorer les opportunités du journalisme dopé à l’IA pour faire passer la qualité, la pertinence sociale et le modèle commercial du journalisme au niveau supérieur », a déclaré le PDG du groupe dans le même communiqué.

Ce changement de philosophie a déjà eu des conséquences très concrètes au sein du groupe. Comme le rappelle Le Temps, Axel Springer a déjà commencé à réduire ses effectifs avec l’objectif d’automatiser de plus en plus de tâches grâce à l’IA, comme la correction ou la mise en page.

L’IA, future plaque tournante des médias ?

Ce n’est pas la première fois qu’OpenAI tente de tisser des liens avec le monde des médias. En juillet dernier, l’entreprise a déjà conclu un accord avec l’Associated Press pour l’utilisation de ses contenus. D’après l’Usine Digitale, ce contrat ne donnait pas le droit à l’entreprise de produire du contenu basé sur ce matériel. À ce niveau, l’accord entre Axel Springer et l’écurie de Sam Altman est une grande première — mais ce n’est probablement qu’une question de temps avant qu’il fasse des émules.

Par exemple, cet automne, la maison mère du célèbre Wall Street Journal a révélé qu’elle avait aussi commencé à négocier l’utilisation de ses produits par des entreprises spécialisées dans l’IA, sans toutefois révéler s’il s’agissait d’OpenAI ou d’un concurrent. Pour son PDG Robert Thomson, il s’agit d’une mesure pragmatique afin d’éviter que le contenu journalistique soit pillé sans vergogne — et sans contrepartie — par des IA avant que la situation ne dégénère. « La propriété intellectuelle des médias est menacée et nous devrions réclamer avec vigueur une compensation », cite Le Monde.

Une législation encore balbutiante

Mais tout le monde n’adhère pas à cette façon de procéder. D’autres tauliers du monde des médias, comme le New York Times, Reuters ou Radio France, commencent à ériger des barrières pour se défendre contre l’appétit dévorant des modèles de langage pour le contenu. Toujours d’après l’Usine Digitale, ils ont mis à jour leurs mentions légales pour que leurs articles « ne soient pas utilisés dans l’entraînement des modèles d’intelligence artificielle ».

Les institutions, de leur côté, se préparent aussi à ce grand changement de paradigme. Au début du mois, le Conseil, la Commission et le Parlement européen sont enfin tombés d’accord sur le contenu du fameux AI Act, un texte très important qui vise à réglementer l’utilisation de l’intelligence artificielle.

Mais tout le monde, aussi bien du côté des médias que des régulateurs et du public, manque encore de recul sur l’impact de cette révolution technologique qui commence déjà à bouleverser notre façon de consommer des informations. Il conviendra donc d’être particulièrement attentif à ces questions à l’avenir, et en particulier sur les prochaines années pendant lesquelles l’humanité va devoir négocier un virage extrêmement technique.

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Source : Le Monde

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