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Pourquoi les éclipses intéressent autant les chercheurs ?

Ces phénomènes ne sont pas seulement de superbes spectacles très plaisants à observer (avec les équipements de protection adéquats, bien entendu); ce sont aussi d’excellentes occasions de mener des travaux scientifiques très intéressants.

Ce 8 avril, la Lune va passer pile entre notre planète et le Soleil, produisant ainsi une éclipse totale — un phénomène qui ne survient qu’une fois toutes les quelques années. Malheureusement, les Français de métropole ne seront pas gâtés lors de cette édition 2024 ; notre pays n’étant pas situé dans la ligne de totalité, nous ne pourrons assister qu’à une éclipse partielle, contrairement à certains habitants d’Amérique du Nord qui seront en première loge pour profiter du spectacle.

Certes, cela n’empêchera pas la population de profiter d’un beau spectacle au paroxysme du phénomène, qui surviendra à 20 h 17 dans l’Hexagone. Mais les citoyens ne seront pas les seuls à avoir les yeux rivés sur le ciel ce 8 avril : l’événement est aussi attendu de pied ferme par les chercheurs.

L’ionosphère à la loupe

C’est notamment le cas du côté de la NASA; qui a préparé trois fusées spécialement pour l’occasion. Cette initiative s’inscrit dans le cadre de la mission APEP, pour Atmospheric Perturbations around Eclipse Path. Comme son nom l’indique, son objectif est de profiter de cette opportunité rare pour étudier l’impact de l’éclipse sur l’atmosphère de notre planète, et plus spécifiquement sur une couche appelée l’ionosphère.

Cette dernière est surtout connue pour être le berceau des aurores. Mais elle joue aussi un rôle crucial dans les communications ; elle a la capacité de dévier les ondes radio, ce qui est important pour les communications longue distance. Comprendre le comportement de l’ionosphère est donc fondamental, notamment pour l’aéronautique et les opérations des satellites.

Ionosphere Iss Aurore
Une aurore dans l’ionosphère vue depuis l’ISS. © NASA

Ces propriétés, l’ionosphère les doit à sa composition. Elle contient de grandes quantités de particules chargées, car elle est constituée en partie de plasma — le quatrième état de la matière qui sert notamment de substrat aux expériences de fusion nucléaire.

Or, la matière ne peut pas arriver spontanément dans cet état ; elle a besoin de la contribution de plusieurs phénomènes qui ont pour effet d’arracher des électrons aux atomes — et il se trouve justement que les radiations solaires jouent un rôle important dans ce processus. Par conséquent, l’éclipse offre une opportunité rare aux chercheurs, puisque notre planète va être temporairement épargnée par les rayons du Soleil aujourd’hui.

C’est là qu’interviennent les trois fusées de la mission APEP. Chacune d’entre elles a pour objectif de déployer quatre capteurs à un peu plus de 400 kilomètres d’altitude afin de mesurer la quantité de particules chargées avant, pendant, et après l’éclipse pour quantifier l’impact du Soleil sur l’ionosphère, et par extension sur les télécommunications.

Pour préparer cette échéance le mieux possible, la NASA a procédé à une sorte de grande répétition générale lors d’une éclipse annulaire survenue en 2023. Ce test a déjà produit des résultats intéressants : les instruments ont enregistré une forte diminution du nombre de particules chargées, et cette baisse pourrait altérer la capacité des satellites à communiquer.

Les experts de l’agence vont désormais retenter l’expérience lors de cette éclipse totale en espérant collecter encore plus de données. Ils vont notamment comparer l’ampleur de la baisse de particules chargées entre les deux épisodes et la taille de la zone affectée. Cela permettra d’affiner les modèles qui décrivent l’impact du Soleil sur notre atmosphère, ce qui est intéressant en termes de physique théorique, mais aussi en pratique, puisque ces données pourraient nous aider à concevoir des systèmes de communication encore plus performants.

La couronne solaire sous son meilleur jour

En outre, cette éclipse sera aussi une occasion de mener d’autres études très intéressantes, notamment sur la dynamique de la couronne du Soleil. Cette dernière joue un rôle crucial dans la météo solaire ; par exemple, c’est là que naissent des phénomènes comme les éruptions solaires et les éjections de masse coronale, qui peuvent là encore avoir un impact important sur les systèmes de communication terrestres.

La couronne du Soleil lors d'une éclipse
© ipicgr – Pixabay

Malheureusement, la couronne est typiquement assez difficile à étudier à cause de la forte brillance de l’astre. Certes, il existe aujourd’hui des instruments spécialement prévus à cet effet, les coronographes ; mais la quantité de détails qu’ils peuvent observer est tout de même limitée par la luminosité élevée.

Puisque cette dernière va chuter drastiquement pendant l’éclipse, ce sera donc une occasion formidable de faire tourner les coronographes à plein régime en espérant capturer des détails qui nous aideront à comprendre la dynamique de la couronne. C’est particulièrement excitant dans le contexte actuel, puisque le Soleil est désormais très proche du pic de son cycle d’activité de 11 ans. « Les chances d’observer quelque chose de fantastique sont très élevées », se réjouit Pam Pelroy, directrice adjointe de la NASA.

Des comportements étranges chez les animaux

Enfin, il y a une autre catégorie de chercheurs pour qui l’éclipse risque d’être très intéressante : les éthologues, qui étudient le comportement des animaux. En effet, les spécialistes ont observé que de nombreuses espèces présentaient des comportements singuliers pendant ces phases d’obscurité.

Le phénomène est assez marqué chez plusieurs groupes d’oiseaux, dont les chants et les motifs migratoires peuvent changer significativement. Les chauves-souris, de leur côté, ont tendance à émerger de leur sommeil pendant les éclipses, ce qui pourrait renseigner les biologistes sur leur rythme circadien. On constate aussi d’autres effets encore mal compris chez les mammifères marins et plusieurs espèces d’insectes, comme les criquets ou les abeilles. Pour naturalistes, il s’agira donc d’une formidable occasion d’étudier ces motifs comportementaux pour mieux comprendre comment les animaux perçoivent le monde qui les entoure.

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