Publier des photos de ses enfants sur les réseaux sociaux est rarement une bonne idée. Le sharenting (qui concerne un parent sur deux en France), en plus de livrer sa progéniture à une exposition à laquelle elle n’a pas encore consenti, n’est pas sans risque : bon nombre de ces photos à l’apparence anodine se retrouvent exploitée par des réseaux pédocriminels, ou elles sont monnayées, parfois détournées via des outils deepfake. L’accumulation s’avère impressionnante : à 13 ans, un enfant moyen figure sur plus de 1 300 images en ligne partagées par ses parents, une identité numérique profonde constituée bien avant qu’il ait voix au chapitre. Pourtant, chaque contenu publié est potentiellement exploitable à des fins très éloignées de l’intention parentale.
Face au danger, certains parents décident, non plus de flouter le visage de leur bambin, mais de recouvrir ce dernier d’un emoji, afin de préserver son anonymat. Avec l’arrivée de l’IA, cette précaution est désormais largement inefficace, estiment les experts. Les outils de génération d’images sont capables, parfois en quelques secondes, de retirer un camouflage basique et de reconstituer un visage dissimulé.
D’autres risques bien réels
De plus, cette technique seule ne règle rien : l’image n’est qu’un élément parmi d’autres. L’âge, l’école, la localisation, les tenues… sont autant d’informations qui peuvent exploitées par des personnes malveillantes ou des algorithmes, même sans visage apparent.
Le cyberharcèlement n’est pas en reste : à l’adolescence, des photos publiées petites peuvent être ressorties, transformées ou détournées pour humilier, exclure ou intimider un jeune. Avec l’essor de l’IA générative, la fabrication d’images fictives mais crédibles prenant pour base une simple photo d’enfance se démocratise, rendant la prévention d’autant plus difficile.
La loi française responsabilise désormais explicitement les parents, qui sont tenus de protéger le droit à l’image de leur enfant, dans l’intérêt supérieur de celui-ci. Diffuser des images sans réflexion ou sans l’accord de l’autre parent (en cas de séparation) expose à des sanctions civiles, voire pénales en cas d’atteinte grave à la vie privée ou à la dignité de l’enfant.
S’il peut demander le retrait de ses photos dès qu’il en a l’âge, l’enfant peine souvent à faire valoir ses droits. Internet n’oublie rien, et c’est aussi valable pour les plus jeunes.
Vers une prise de conscience collective
L’apparition d’une législation dédiée et les appels répétés à la vigilance témoignent d’une prise de conscience tardive mais croissante. “À l’ère de l’IA, il est urgent de réfléchir à deux fois avant de poster une photo de son enfant en ligne — même avec un filtre ou un emoji“, conclut la CNIL dans un communiqué.
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