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Au Texas, un champignon tueur résout un problème vieux de 20 ans

Les fourmis folles rousses sont un fléau pour les habitants du Texas, mais un champignon parasite pourrait bien avoir raison de cet envahisseur.

Les États-Unis ont décidément fort à faire du côté des petites bêtes. En plus des grosses araignées asiatiques qui prolifèrent dans l’est du pays, on peut aussi citer les fourmis folles rousses. Cette espèce invasive, originaire d’Amérique du Sud, mène la vie dure aux habitants du Texas depuis une vingtaine d’années. Mais la population va peut-être voir le bout du tunnel grâce à un allié inattendu : un champignon tueur qui raffole de ces insectes.

C’est une bonne nouvelle pour les locaux. Car depuis son arrivée, cette espèce officiellement nommée Paratrechina longicornis leur en fait voir de toutes les couleurs. Contrairement aux araignées Joro, dont la prolifération n’inquiète pas les chercheurs, cette fourmi a tendance à laisser une marque indélébile sur les niches écologiques qu’elle colonise, même si elle n’est pas dangereuse pour les humains.

Une espèce particulièrement envahissante

Des travaux menés par l’Université du Texas ont montré qu’elles chassaient systématiquement toutes les autres espèces de fourmis de leur territoire. Et il ne s’agit pas que de leurs cousines. De très nombreuses espèces d’insectes auraient déserté ces zones à cause de ces fourmis, qui leur mènent une guerre sans merci lorsqu’il s’agit de s’approprier les ressources des plantes aux alentours.

C’est une sorte de film d’horreur”, explique Edward LeBrun, auteur principal de l’étude repérée par ScienceAlert. En effet, à certains endroits comme le parc d’Estero Llano Grande, leur arrivée a coïncidé avec la disparition locale de très nombreuses autres espèces; on parle de fourmis, mais aussi de scorpions, de lézards, de serpents… Leur présence aurait aussi un impact significatif sur la nidification de certaines espèces d’oiseaux.

Elles s’en prennent même à des espèces animales bien plus volumineuses. Elles peuvent même attaquer le bétail, petit ou grand, au niveau des yeux et des narines. Certains observateurs considèrent également qu’elles sont une plaie potentielle pour l’agriculture.

Encore pire : elles provoquent même des dégâts considérables au niveau de l’infrastructure. Elles ont en effet la fâcheuse manie de nicher dans des endroits comme des disjoncteurs électriques, avec toutes les conséquences que cela implique.

Un spécimen de Paratrechina longicornis. © Michael Bentley – WikiCommons

Un champignon tueur à la rescousse

Pour toutes ces raisons, les chercheurs tentent de faire battre la fourmi folle rousse en retraite, sans succès. Mais heureusement pour eux, un allié inattendu pourrait bien s’en charger à leur place; il s’agit d’un pathogène assimilable à un champignon tueur qui fait déjà des ravages chez ces insectes.

L’équipe de LeBrun l’a identifié en 2016, lorsqu’ils sont tombés sur quelques fourmis qui semblaient étonnamment gonflées. Après analyse, les chercheurs ont trouvé des spores appartenant à une toute nouvelle espèce de microsporidie, jamais documentée jusqu’à présent.

Très sommairement, les microsporidies sont des champignons parasites intracellulaires; ils sont connus pour leur propension à transformer des insectes en véritables chevaux de Troie parasitaires. En effet, lorsqu’elles parviennent à se loger dans un hôte, elles transforment certaines cellules en nouvelles plateformes de production de spores qui peuvent à leur tour infecter, puis décimer rapidement le reste des supercolonies que forment ces fourmis.

Un sporoblaste de Fibrillanosema crangonycis, une espèce de microsporidie. © Javier Martin – WikiCommons

Une approche sélective exploitable à grande échelle

D’après Edward LeBrun, auteur principal de l’étude, ce pathogène aurait déjà contribué à l’éradication de certaines de population de ces fourmis. Avec ses collègues, ils ont tenté de l’exploiter pour éradiquer les fourmis folles rousses dans un parc naturel en contrôlant soigneusement sa propagation. Et l’expérience a été un franc succès; en quelques années, le parc en question a été complètement purgé de cette espèce invasive.

L’avantage, c’est que ce champignon est extrêmement difficile dans le choix de ses hôtes. Cela limite considérablement sa capacité à ravager tout l’écosystème dans lequel il est introduit; il est même possible de l’utiliser de façon à ne toucher que cette espèce en particulier. Cela représente un travail de suivi écologique monumental, mais le jeu en vaut la chandelle.

L’équipe va désormais tester ce pathogène dans de nouvelles niches écologiques sensibles. Ils espèrent ainsi protéger les espèces menacées par la conquête de l’armée rousse d’ici quelques années.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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