Tout vient à point à qui sait attendre. Plus de trois ans après sa création officielle, l’US Space Force va enfin envoyer un de ses représentants en orbite. De quoi donner un peu de crédit à une agence gouvernementale toujours en quête de légitimité.
L’heureux élu, Nick Hague, est déjà un vétéran confirmé. Il a déjà deux voyages dans l’espace à son actif — même si le premier n’a duré que quelques minutes. En effet, son premier décollage en direction de l’ISS à bord d’une capsule Soyouz russe a été interrompu à mi-chemin à cause d’un capteur défaillant, forçant l’engin à pratiquer un atterrissage d’urgence.
Mais rien de bien traumatisant pour cet ex-militaire qui dispose déjà d’une grande expérience en tant que pilote de test et de combat dans la prestigieuse US Air Force. Il a donc remis le couvert un an plus tard, en 2019. Et cette fois, tout s’est déroulé comme prévu. Il a rejoint l’ISS sans problème, et y a demeuré pendant 203 jours en tant qu’ingénieur.
Quelques mois plus tard, sa carrière a connu un tournant. Il a fait partie des premières personnes à contribuer à la toute nouvelle Space Force, fondée un peu plus tôt dans l’année par le sulfureux Donald Trump. Après y avoir passé deux ans en tant que directeur des tests en parallèle de son poste au sein de l’Air Force, il y a été transféré définitivement en 2021.
C’est donc en tant que représentant de cette institution qu’il va rallier l’ISS pour la seconde fois en août prochain à bord d’une fusée SpaceX, dans le cadre de la mission Crew-9. Même s’il s’agit d’une mission de routine, il s’agit donc un événement charnière pour la Space Force ; c’est la toute première fois qu’un de ses membres va séjourner en orbite.
Un petit poucet qui a du mal à s’imposer
Il s’agit d’un symbole relativement important, car le bilan de la Space Force n’est pas franchement reluisant pour le moment. L’agence a connu des débuts pour le moins difficiles, en partie à cause de sa filiation avec cet ex-président extrêmement clivant. Et malheureusement, ses responsables ont enchaîné plusieurs bourdes de communication regrettables qui n’ont pas aidé le petit nouveau à asseoir sa légitimité aux côtés des corps historiquement prestigieux comme l’Air Force.
On peut citer pêle-mêle l’affaire de l’uniforme, son blason qui présente une ressemblance troublante avec le célèbre logo Starfleet Command de la série Star Trek, ou le titre officiel de ses membres — les « Gardiens » — qui a d’abord été perçu comme une blague en référence aux Gardiens de la Galaxie. Le clou du spectacle est arrivé lorsque l’USSF a dévoilé son hymne officiel, un curieux mélange d’orchestration kitsch et de vers maladroitement composés qui ont suscité de nombreuses moqueries aux quatre coins de la toile.
À ce jour, l’US Space Force reste donc le parent pauvre des forces armées américaines. Elle a toutes les peines du monde à se construire une réputation à la hauteur de ses ambitions, et reste très en retrait par rapport à ses illustres cousines. Une image encore renforcée par le fait qu’aucun de ses membres n’avait encore mis un orteil dans l’espace dans le cadre de son poste.
Le séjour de Nick Hague à bord de l’ISS vêtu du blason de l’USSF va au moins permettre de gommer cette incohérence dommageable. Il s’agit donc d’un premier pas encourageant pour l’agence. Mais cette mission ne va certainement pas redorer son blason à elle toute seule. Il en faudra beaucoup d’autres pour que la Space Force puisse obtenir le respect après lequel elle court depuis 2019.
Il conviendra donc de suivre les prochaines missions de l’agence, mais aussi le résultat des élections aux États-Unis en fin d’année. Car si Donald Trump en ressort gagnant et hérite d’un second mandat, il pourrait bien faire tout son possible pour remettre son bébé sous le feu des projecteurs.
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