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OpenAI met la main sur un nouveau poids lourd de la presse

L’entreprise continue de signer des contrats avec des tauliers du monde des médias pour entraîner ChatGPT. Des collaborations qui bénéficient aux deux parties, mais qui font aussi émerger des questions inconfortables.

OpenAI continue de tisser des liens de plus en plus étroits avec les grands noms de la presse pour alimenter son agent conversationnel dopé à l’IA. Dans un communiqué, le Financial Times, quotidien économique et financier de référence en Europe, a annoncé avoir trouvé un accord avec la firme américaine pour permettre à ChatGPT d’exploiter son matériel.

Cela permettra à l’écurie de Sam Altman d’utiliser les articles du Financial Times pour entraîner son incontournable chatbot. Ce dernier pourra donc s’appuyer sur une nouvelle source d’informations fiables et solides pour répondre aux requêtes des utilisateurs.

L’ogre ChatGPT réclame du contenu

C’est quelque chose que l’entreprise avait autrefois tendance à faire par défaut, sans demander leur avis aux organes de presse concernés. Elle invoquait pour cela la notion de « fair use », une doctrine légale qui permet l’utilisation de contenu couvert par le droit d’auteur dans des cas bien précis qui relèvent de l’intérêt public (enseignement, critique…).

Mais si cet argument aurait peut-être été justifiable sur les premières années d’OpenAI, lorsqu’il s’agissait encore d’une organisation à but non lucratif dont le seul objectif était de contribuer à l’humanité, la donne a bien changé depuis le rapprochement avec Microsoft. Depuis que Satya Nadella a signé son fameux chèque de 10 milliards de dollars, l’entreprise a considérablement changé de modèle et génère aujourd’hui des profits significatifs. Une volte-face qui a écœuré de nombreux observateurs, dont Elon Musk.

Dans ce nouveau contexte, l’exploitation gratuite du contenu était devenue tout simplement indéfendable. De nombreux groupes de presse prestigieux ont donc lancé une grande offensive judiciaire pour protéger leur travail du pillage opéré par la startup, forçant ainsi cette dernière à ralentir. Un problème de taille pour Sam Altman ; il y a quelques mois, il a déclaré qu’il était « impossible » de faire progresser l’IA générative sans lui donner l’accès à du contenu copyrighté de bonne qualité.

Une collection qui grandit à vue d’œil

Pour continuer de nourrir son bébé sans s’exposer davantage, OpenAI a donc pris une décision radicale : signer des contrats juteux avec la presse. Cela a commencé avec les journaux du groupe Axel Springer (Die Welt, Bild, Politico, Business Insider…), qui a ouvert la boîte de Pandore en décembre 2023. Le Monde et les journaux du groupe espagnol Prisa Media ont suivi dans la foulée.

Avec le Financial Times, l’entreprise s’offre donc un nouveau poids lourd pour renforcer la crédibilité de son chatbot, dont la réputation a régulièrement été ternie par des bourdes conséquentes. En échange, le média recevra deux contreparties. La première est financière, et même si les sommes en jeu n’ont pas été dévoilées, sont sans doute conséquentes. Des sources proches du dossier affirmaient que l’accord entre OpenAI et le groupe Springer se chiffrait en dizaines de millions d’euros, et on peut s’attendre à ce que l’ordre de grandeur soit à peu près le même dans le cadre du contrat avec le Financial Times.

En parallèle, le média bénéficiera aussi d’un supplément d’exposition et de trafic. En effet, les utilisateurs verront désormais apparaître des résumés et des extraits d’articles dans les réponses qui concernent des thématiques ou des sujets d’actualités couverts par le média, ainsi que des liens vers les articles concernés.

Un risque pour l’indépendance de la presse ?

Dans l’absolu, il s’agit d’une grande victoire pour le média. Il s’offre un complément de revenu substantiel ainsi qu’un accès privilégié aux millions d’utilisateurs de ChatGPT. Mais ce genre de collaboration fait aussi émerger des questions inconfortables. Par exemple : peut-on faire confiance à la neutralité d’un média qui a signé ce genre d’accord, notamment dans les articles qui parlent d’OpenAI et de Microsoft ? Tous les journaux concernés affirment que ces contrats ne remettent aucunement en cause leur indépendance éditoriale. Mais il faudra tout de même garder cette thématique en tête, surtout si OpenAI continue sur sa lancée.

Même si elle n’a aucun contrôle sur les lignes éditoriales de ses partenaires, elle pourrait facilement décider d’exclure les articles qui ne correspondent pas à vision… ou à celle de Microsoft. Une démarche qui pourrait lui offrir un degré de contrôle important sur la circulation des informations. Surtout si l’entreprise finit par s’allier à la plupart des grands organes de presse de la planète, dans un contexte où de plus en plus de monde interroge le chatbot au quotidien.

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