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Un homme paralysé a posté son tout premier tweet grâce à une puce cérébrale

Un homme quasiment entièrement paralysé par sa sclérose a pu récupérer une partie de son autonomie grâce à une puce cérébrale.

Les puces cérébrales font partie des sujets qui suscitent autant d’excitation que d’inquiétude, et souvent à juste titre. Mais avant de parler de transhumanisme et des cyborgs du futur, cette technologie permettra d’abord de révolutionner la médecine régénérative. La preuve avec ces travaux repérés par Interesting Engineering; ils ont permis à un Australien de 62 ans atteint de sclérose latérale amyotrophique (SLA) de devenir la toute première personne à envoyer un message sur les réseaux sociaux grâce à une interface cerveau-machine, malgré sa maladie extrêmement invalidante.

Cette technologie, que l’on peut sommairement qualifier de puce cérébrale, consiste exactement en ce que suggère son nom; il s’agit d’implanter un appareil capable de délivrer et de lire des signaux électriques pour servir de relais entre le cerveau et un ordinateur. Certains, comme Elon Musk avec son Neuralink, songent déjà à utiliser cette technologie pour démultiplier les capacités de l’humain; une approche qui relève du transhumanisme et qui n’a pas grand-chose à voir avec cette étude. Ce qui nous intéresse ici, c’est davantage l’immense potentiel thérapeutique de cette technologie. Celui-là même qui fait fantasmer de nombreux chercheurs en neurologie clinique.

C’est sur ce terrain que joue Synchron, une entreprise américaine qui compte bien soigner la paralysie ainsi que d’autres conditions liées de près ou de loin au système nerveux. C’est leur prototype, baptisé Stentrode, qui a été implanté chez Philip O’Keefe. L’objectif : rendre une partie de son autonomie à un patient dont la paralysie progressait davantage chaque jour.

Le processus a démarré en avril 2020. À cette époque, la SLA d’O’Keefe venait d’atteindre un stade critique; sa sclérose était devenue trop envahissante, au point de l’empêcher d’écrire sur un clavier. Il a donc été sélectionné pour tester cette puce; et tous les acteurs de ce processus ont dû être absolument enchantés, car l’opération a fonctionné de manière assez spectaculaire.

“Comme apprendre à faire du vélo”

Au début, la transition n’a pas été évidente. “C’est comme apprendre à faire du vélo”, explique O’Keefe dans une déclaration rédigée à l’aide de sa puce. “Ça demande de l’entraînement”, explique-t-il. Mais le jeu en vaut la chandelle; une fois cette période d’adaptation passée, O’Keefe a pu récupérer un niveau d’autonomie qui relevait longtemps de l’utopie pour des patients atteints de SLA aussi avancée.

Une fois que vous êtes lancé, ça devient naturel”, explique-t-il. “Maintenant, je peux simplement penser à l’endroit où je veux cliquer sur un écran pour le faire. Je peux envoyer des mails, gérer mon compte bancaire, faire du shopping, et maintenant même écrire au monde entier sur Twitter !”, jubile-t-il. Et ça n’a rien à voir avec les systèmes comme celui qu’utilisait notoirement Stephen Hawking. Ici, pas d’infrarouge ou de système optique quelconque : tout se passe directement au niveau nerveux.

Plus besoin de touches ou de voix. J’ai créé ce tweet rien qu’en y pensant”, a-t-il ainsi posté via Thomas Oxley, le PDG de Synchron qui lui a prêté son compte Twitter pour l’occasion. Dans le communiqué de Synchron, il explique que cette technologie lui a même permis de continuer à exercer son activité professionnelle de consultant. Un témoignage qui fait chaud au cœur pour un succès humain et scientifique retentissant. D’autant plus que cette puce marque encore des points à d’autres niveaux. Car plus de fonctionner remarquablement bien, elle est nettement moins invasive que l’archi majorité des autres processus du genre.

Avec les procédés traditionnels, implanter une puce de ce type nécessite une craniotomie; il faut couper un morceau de crâne pour installer directement la puce au contact du cerveau. Une procédure extrêmement lourde et potentiellement risquée, que les chercheurs de Synchron sont parvenus à contourner; ils ont implanté leur engin à l’intérieur d’une veine cérébrale, grâce à un technique bien moins risquée qui passe par la jugulaire et sert habituellement à soigner les accidents vasculaires cérébraux.

C’est particulièrement important pour espérer proposer des traitements de ce genre à grande échelle; en effet, moins la procédure chirurgicale sera lourde, plus elle sera accessible pour des patients à l’état de santé déjà fragile, et plus cette technologie aura un impact positif en termes de santé publique.

2022 : le début d’une nouvelle ère en neurologie clinique ?

L’année 2021 aura été un véritable tournant dans le monde des interfaces cerveau-machine. En quelques mois à peine , nous avons eu droit à des publications scientifiques toutes plus saisissantes les unes que les autres sur des travaux réalisés ces dernières années.

On se souvient par exemple de ces travaux préliminaires sur la gestion de la douleur, ou encore de la saisissante expérience des chercheurs espagnols qui ont permis à une femme aveugle de voir à nouveau. La neutrothérapie par interface cerveau-machine ne tient donc plus de la science-fiction; c’est désormais une réalité scientifique qui est en passe de se démocratiser. Et ça, c’est un progrès immense. On peut déjà affirmer sans aucun risque que cela va transformer notre approche de ces maladies; un peu comme les traitements à l’insuline ont changé la vie des diabétiques.

C’est d’autant plus vrai que toutes ces approches ne sont pas opposées, mais plutôt complémentaires. Par exemple, on peut tout à fait imaginer combiner l’approche de Synchron avec celle des chercheurs californiens qui ont développé un système pour améliorer la fluidité de la communication à travers ces implants, ou encore avec la technologie des neurograins dont nous vous parlions récemment. Nous sommes encore bien loin de pouvoir guérir toutes ces pathologies terribles, mais à défaut, nous serons bientôt capables de les rendre moins  insupportables. Quelle époque !

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Source : Synchron

2 commentaires
  1. Bonjour
    Je suis surpris concernant votre commentaire sur Neuralink car sur le site même on peut y lire que leur implant est bien pour aider les paraplégiques, entre autres à recouvrer une certaine autonomie ???

  2. @ Robert St-Jean
    Bonjour Robert,
    Effectivement, comme la grande majorité des entreprises qui travaillent sur des interfaces cerveau-machine, le Neuralink d’Elon Musk servira avant tout dans un cadre médical; en revanche, Musk a aussi annoncé d’autres fonctionnalités pas nécessairement thérapeutiques, comme le fait d’écouter de la musique grâce à l’implant.
    La phrase à laquelle vous faite référence ne renie pas la vocation thérapeutique de Neuralink, mais illustre le fait que ce n’est pas leur seul axe de recherche, contrairement au laboratoire à l’origine de ces travaux.

    Bien cordialement,
    Antoine Gautherie

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