Sur Mars, Curiosity a photographié d’étranges tentacules rocheux

Même si Perseverance a tendance à lui voler la vedette depuis qu’il a débarqué sur Mars, le rover Curiosity continue de se rendre utile loin des caméras. Il y a quelque temps, il a pris une superbe photo d’une structure rocheuse à l’apparence frappante puisqu’elle ressemblait à une drôle de petite fleur; cette fois, le robot a débusqué une paire d’étranges colonnes qui pourraient ressembler à des tiges.

Leur forme a de quoi surprendre dans ce paysage où les structures plutôt verticales sont rares; on dirait presque un liquide qui se serait solidifié instantanément dans le vide de l’espace. Certains pourraient aussi y voir une sorte de plante fossilisée, ou même un tentacule alien qui aurait émergé de la poussière. Mais la véritable explication est un brin moins excitante.

#PPOD: Here is another cool rock at Gale crater on Mars! The spikes are most likely the cemented fillings of ancient fractures in a sedimentary rock. The rest of the rock was made of softer material and was eroded away. 📷: @NASA @NASAJPL @Caltech #MSSS fredk, acquired on May 17. pic.twitter.com/RGfjmRBfI7

— The SETI Institute (@SETIInstitute) May 26, 2022

L’équivalent martien des cheminées de fée ?

D’après les chercheurs, il s’agit vraisemblablement d’un équivalent miniature des cheminées de fée qui existent sur Terre. Il s’agit de colonnes naturelles de roche qui ont la particularité d’être surmontées d’une sorte de chapeau composé d’une roche différente. Les plus connues se trouvent en Turquie, mais on en trouve aussi en France, notamment près des Alpes ou dans le Queyras.

Tous les environnements terrestres où on les trouve présentent un point commun : on y trouve des roches sédimentaires en abondance. Ce sont des roches friables et assez peu solides qui sont formées par l’accumulation de dépôts issus de l’érosion.

Dans certaines conditions, ces roches peuvent se retrouver prises en sandwich et compressées entre d’autres couches composées de roche bien plus dense et résistante à l’érosion. Au fil des siècles, les différents points du terrain ne sont donc pas rabotés à la même vitesse; l’eau et le vent s’infiltrent dans des petits espaces, et avec le temps, ils commencent à creuser des sillons dans la roche la plus friable.

Il en résulte un effet boule de neige : cette érosion creuse des sillons qui deviennent progressivement des canaux où l’eau peut s’écouler. Cela conduit à une érosion de plus en plus importante qui ne laisse que quelques structures relativement verticales, un peu comme des figurines dont on aurait dissout le moule.

Des témoignages directs du passé liquide de Mars

Ce n’est pas la première fois que Curiosity repère des structures qui ont probablement été formées suite à un processus de ce type. Les “fleurs” que le rover a repérées récemment sont aussi des structures sédimentaires. Même chose pour des tas de petites billes rocheuses arrachées à la surface par l’érosion que la NASA a affectueusement baptisées “myrtilles”.

Tous ces éléments sont particulièrement intéressants pour les chercheurs; il s’agit de preuves quasiment indiscutables qu’il y a bien eu de l’eau à la surface de la planète rouge. Cela fait écho aux conclusions de Perseverance, dont les travaux ont permis à la NASA de confirmer que le cratère de Jezero était bien un ancien lac asséché (voir notre article).

Or, sur Terre, ces roches sédimentaires façonnées par les mouvements de fluides sont autant de réceptacles potentiels qui peuvent abriter des traces d’une vie passée. La NASA a donc bon espoir qu’il reste des traces d’une hypothétique vie martienne à proximité.

En analysant ces roches et leurs environnements par l’intermédiaire de différents rovers comme Curiosity ou Perseverance, la NASA espère donc trouver des indices sur le passé géologique de la planète. Elle pourra ainsi tenter de répondre à la sempiternelle question de la vie sur Mars.

Nous sommes d’ailleurs au beau milieu d’une période très excitante à ce niveau. Perseverance explore en ce moment le delta à la bordure du cratère de Jezero où il s’est posé l’année dernière (voir notre article). Il s’agit de l’objectif principal de sa mission, car plusieurs des conditions qui auraient potentiellement pu participer à l’apparition d’une forme de vie telle qu’on la connaît y sont réunies. Il convient donc de rester en alerte, car il n’est pas exclu que la NASA se fende d’une annonce historique au cours des prochains mois.

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