Passer au contenu

Terran 1 : la toute première fusée imprimée en 3D a décollé !

Le bijou de technologie de Relativity Space n’a pas réussi à atteindre l’orbite, mais elle a réussi à passer le cap du Max-Q – un succès déterminant pour ce lanceur révolutionnaire.

C’était enfin le grand soir pour Terran I, la première fusée presque entièrement imprimée en 3D au monde. Le bijou de technologie signé Relativity Space a enfin réussi à quitter le pas de tir dans la nuit du 22 au 23 mars. Elle n’a malheureusement pas réussi à atteindre l’orbite, mais les ingénieurs de la firme peuvent tout de même être très fiers de cette grande première.

Le premier objectif de cette mission baptisée Good Luck, Have Fun, c’était déjà de quitter le pas de tir. Terran 1 avait déjà tenté d’y parvenir deux fois, les 9 et 11 mars derniers. La première fois, elle a rencontré un problème de température des ergols liquides qui a forcé les ingénieurs à interrompre la procédure. Lors de la seconde tentative, c’est une météo peu clémente qui a cloué l’engin au sol.

Cette fois, c’était la bonne.

Malgré un report d’environ une heure et demie à cause de puissantes bourrasques en altitude, la fusée est arrivée pour la première fois au terme du compte à rebours. Les neuf moteurs-fusées Aeon 1 se sont mis à rugir, arrachant Terran 1 à sa planète natale pour la toute première fois.

Une première case très importante de cochée. Mais il était encore bien trop tôt pour crier victoire. En effet, avant d’atteindre l’orbite, la fusée devait encore passer plusieurs étapes importantes, dont deux absolument critiques.

Le Max-Q franchi avec succès

La première, c’était de passer le cap du Max-Q, c’est-à-dire le point de l’ascension où les contraintes mécaniques qui s’exercent sur le véhicule atteignent leur maximum. C’est un moment déterminant pour tous les nouveaux lanceurs ; passer le Max-Q sans encombre, cela prouve que l’engin est suffisamment résistant pour résister à ces forces énormes.

Mais c’était encore plus important dans le cas de Terran 1. C’est la toute première fois que la quasi-totalité des éléments structuraux est imprimée en 3D. Tous les aspects de ce mode de production encore assez expérimental ne sont pas encore maîtrisés. Et même si Relativity a évidemment procédé à de très nombreux tests, personne ne savait si les pièces produites ainsi allaient tenir le choc en conditions réelles. Les ingénieurs ont donc probablement poussé un premier soupir de soulagement lorsque Terran 1 a filé au-delà du Max-Q sans problème après environ 80 secondes de vol.

Un dysfonctionnement du 2e étage

Mais Terran n’était pas au bout de ses peines. Il lui restait encore un checkpoint majeur à atteindre pour se diriger sereinement vers l’orbite : la séparation des deux étages. Là encore, il s’agit souvent d’un moment critique, surtout pour les nouveaux véhicules. C’est un ballet qui doit être coordonné à la perfection pour permettre la libération, puis la mise à feu du 2e étage qui doit atteindre l’espace. Dans notre dernier article, nous avions avancé qu’il s’agirait de l’obstacle le plus difficile à surmonter pour cette nouvelle fusée. Et c’est effectivement là que les problèmes ont commencé.

Après 2 minutes et 40 secondes (1:24:35 sur la vidéo ci-dessus), le deuxième étage s’est séparé de son booster. Le moteur Aeon Vacuum a réussi à démarrer comme prévu. Mais en observant les images de la caméra embarquée, les spectateurs ont rapidement compris que quelque chose ne tournait pas rond. Le propulseur s’est mis à fonctionner par intermittence, et les équipes de Relativity ont annoncé dans la foulée que la fusée commençait à ralentir. Un peu plus de deux minutes plus tard, les équipes au sol ont confirmé l’anomalie. Elles n’ont pas tardé à déclarer officiellement que la mission était terminée.

Il faudra donc patienter pour voir la première fusée methalox atteindre l’orbite. Car pour rappel, l’impression 3D n’est pas la seule technologie novatrice employée par Relativity. Les moteurs de Terran 1 utilisent un mélange de méthane et d’oxygène, contrairement aux moteurs dits kerolox qui misent sur un mélange kérosène-oxygène. Jusqu’à présent, aucun véhicule de ce genre n’a réussi à atteindre l’orbite terrestre. Et la défaillance du moteur Aeon Vacuum que Relativity va encore devoir fournir quelques efforts à ce niveau.

Un échec à Relativiser

Mais cet échec doit absolument être remis dans son contexte. Comme nous le précisions dans de notre article précédent, le fait d’atteindre l’orbite du premier coup avec un tout nouveau lanceur est un véritable exploit technique. Il était assez improbable que la firme y parvienne. Cela n’a rien d’infamant, surtout avec un engin aussi fondamentalement différent des lanceurs classiques.

De plus, Terran 1 n’emportait pas de charge utile commerciale de grande valeur. Il était simplement chargé avec un gros morceau de métal imprimé en 3D de 1250 kg pour prouver sa capacité à emporter du matériel. Il n’y a donc pas de perte scientifique à déplorer.

Mais le plus important, c’est que le simple fait d’avoir réussi à franchir le Max-Q représente déjà un énorme succès. Cela prouve définitivement que l’impression 3D est viable dans le contexte de l’aérospatiale. Cette troupe de visionnaires ne s’est pas trompée en misant sur cette approche révolutionnaire.

Et cela aura sans doute des conséquences très concrètes à l’avenir. En effet, de nombreux observateurs s’attendent à ce que cette technologie révolutionne complètement cette industrie à moyen terme. Un peu comme SpaceX l’a déjà fait avec ses lanceurs réutilisables.

Nouvelle sortie pour Terran 1… ou cap sur Terran R ?

Maintenant que la viabilité du concept est avérée, ce grand changement de paradigme peut enfin démarrer. Les ingénieurs de Relativity vont pouvoir se plonger dans les données récoltées lors de ce vol pour peaufiner Terran 1. Et surtout, ils vont pouvoir valider un certain nombre d’éléments sur sa petite sœur.

En effet, ce véhicule n’est qu’un prototype. Vers 2024, il doit laisser sa place à Terran R. C’est une autre fusée nettement plus volumineuse. Elle sera capable d’emporter 20 tonnes de charge utile en orbite terrestre basse, soit 16 fois plus que Terran 1. A titre de comparaison, c’est à peu près équivalent à ce que propose le Falcon 9 de SpaceX.

la fusée Terran 1 de Relativity Space
© Relativity Space

Désormais, toute la question va être de savoir ce que compte faire Relativity après ce demi-échec. Le PDG et fondateur Tim Ellis a suggéré que la firme pourrait se satisfaire de cette preuve de concept. Elle envisage de commencer à travailler directement sur Terran R. C’est une approche qui aurait du sens. Car maintenant que la viabilité de l’impression 3D est confirmée, la firme n’a pas forcément intérêt à gaspiller du temps et des ressources sur un démonstrateur qui ne fait de toute façon pas partie des plans à long terme ; autant aller droit au but et commencer à développer le futur fer de lance de la firme.

Pour l’instant, Relativity n’a pas encore communiqué à ce sujet. Il conviendra donc de rester aux aguets ces prochaines semaines. Un communiqué annoncera bientôt si la firme compte retenter sa chance avec un nouveau Terran I, ou si elle s’estime prête à entrer dans le vif du sujet avec Terran R.

🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Mode