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La première usine spatiale au monde est désormais en orbite

Varda Space Industries espère que ce lancement va marquer le début d’une nouvelle ère dans de nombreuses branches de l’industrie.

C’est un grand moment pour Varda Space Industrie. La semaine dernière, cette start-up californienne fondée par un vétéran de SpaceX a expédié son tout premier satellite en orbite… et ce n’est pas un engin comme les autres. Il s’agit en effet d’un prototype d’usine pharmaceutique spatiale qui servira aussi à étudier les enjeux du vol hypersonique.

Cela fait déjà un certain temps que de nombreux spécialistes réfléchissent aux enjeux de la production dans l’espace. Certains considèrent par exemple qu’il pourrait être très intéressant d’assembler directement des satellites et autres équipements directement en orbite afin de contourner un tas de difficultés logistiques.

Mais ce n’est pas du tout l’objectif du satellite de Varda ; il est conçu pour devenir une usine pharmaceutique. Une idée qui pourrait sembler saugrenue au premier abord, mais qui repose en fait sur des bases on ne peut plus pragmatiques.

La microgravité au service de l’industrie

En éloignant ainsi l’équipement de production de la Terre, on se retrouve dans des conditions dites de microgravité. Et sur le papier, il s’agit d’un avantage important. En effet, la gravité terrestre est une force loin d’être négligeable dans le processus de confection pharmaceutique. En la sortant de l’équation, on peut donc s’affranchir d’un certain nombre de contraintes.

La microgravité mise en évidence par l'astronaute Karen Nyberg
La microgravité, ici mise en évidence par l’astronaute Karen Nyberg, ouvre la porte à de nouveaux procédés industriels très prometteurs. © NASA

Par exemple, sur Terre, les particules suspendues dans un liquide ont tendance à s’agglomérer, à flotter à la surface ou à couler au fond d’un récipient. Ce n’est pas le cas en microgravité ; dans ce cas, les particules flottent sagement dans le liquide avec une distribution plus ou moins homogène.

Et une fois mises bout à bout, ces particularités pourraient permettre de produire des espèces chimiques aux propriétés très intéressantes. Par exemple, un communiqué de Varda explique que cette approche permet d’obtenir un contrôle très important sur « la taille et la distribution des particules ou la structure des cristaux ».

En d’autres termes, cela permet de fabriquer des principes actifs avec une précision extraordinaire. Selon la firme, les bénéfices thérapeutiques sont considérables. Cela permettrait notamment d’obtenir des  molécules plus stables, avec une biodisponibilité plus importante. Et surtout, il serait possible de produire ce genre de composés en très grande quantité beaucoup plus facilement que sur Terre. Et forcément, cette démarche pourrait générer des bénéfices tout simplement ahurissants connaissant le prix de certains principes actifs difficiles à produire.

Deux campagnes de test sur un même véhicule

Avant d’en arriver là, il faudra déjà que cette première campagne de test propose des résultats convaincants. Pendant une semaine, Varda va commencer par vérifier consciencieusement tout l’équipement de son usine. Si ces tests sont concluants, elle va commencer une série d’expériences sur le Ritonavir, un médicament utilisé dans le traitement du SIDA. L’objectif sera de déterminer les éventuelles différences de structure moléculaire qui pourraient apparaître si le principe actif était produit en microgravité.

Mais la mission du satellite ne s’arrêtera pas là. Après environ un mois de test, l’engin va effectuer une manœuvre afin de replonger vers la Terre à plus de 25x la vitesse du son ; et Varda compte bien profiter de cette occasion pour faire d’une pierre deux coups. Dans le cadre d’un contrat avec l’armée américaine, le véhicule a été doté d’un certain nombre d’équipements qui permettront de tester des technologies liées au vol hypersonique — un enjeu majeur de l’aérospatiale et de l’industrie militaire de demain.

L’aube d’une nouvelle ère pour l’industrie

Et si ces tests se révèlent concluants, Varda pourra aussi en bénéficier directement. À terme, elle ambitionne de construire des modules industriels réutilisables qui permettront à ses futurs clients de produire une grande variété de substances et de composants en orbite.

Et cette échéance pourrait arriver relativement vite. Varda prévoit déjà de lancer une seconde mission plus tard dans l’année. Et cette fois, si tout se passe bien, il s’agira d’une mission conjointe avec un véritable client qui compte produire du matériel en microgravité. Très impressionnant pour une entreprise fondée il y a moins de trois ans.

Et le plus enthousiasmant, c’est que Varda est loin d’être la seule entreprise à poursuivre cet objectif potentiellement très lucratif. On peut notamment citer Thales Alenia Space, qui veut prochainement déployer une « plateforme spécialisée pour l’expérimentation et la fabrication dans l’espace » (voir notre article ici).

Et plusieurs autres grands noms de l’aérospatiale ont également des projets similaires. Il conviendra donc de suivre attentivement les retombées de cette aventure qui nous apportera bientôt un avant-goût de l’industrie orbitale de demain.

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