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FLAMINGO : une immense simulation de l’Univers pour révolutionner l’astronomie

Une équipe internationale de chercheurs a réalisé un ensemble de 28 simulations de l’Univers depuis sa genèse. Une manne scientifique qui va contribuer activement aux recherches sur la structure et la dynamique du cosmos.

L’immensité du cosmos fascine les astronomes depuis la nuit des temps. Mais même à notre époque, avec l’aide de nouveaux instruments révolutionnaires comme le James Webb Space Telescope, nous sommes encore très loin de pouvoir le sonder dans sa globalité. Les astronomes sont donc toujours incapables de répondre à certaines questions fondamentales.

Par exemple, la quantité de matière totale qui existe dans notre univers reste mystérieuse, de même que sa répartition. Et à chaque fois que des chercheurs tentent de proposer une réponse, ils se heurtent à d’étranges incohérences qui mettent en évidence les nombreuses lacunes des modèles cosmologiques actuels.

En attendant l’arrivée de nouveaux engins, comme le Roman Space Telescope, les chercheurs n’ont d’autre choix que de s’appuyer sur des simulations. Et fort heureusement, avec les progrès rapides de l’informatique haute performance, celles-ci deviennent de plus en plus ambitieuses. Et cette semaine, une équipe internationale d’astronomes nous l’a prouvé une nouvelle fois en bouclant la plus grosse simulation de l’Univers à ce jour.

28 versions de l’Histoire du cosmos

Ce nouveau modèle baptisé FLAMINGO couvre l’intégralité de l’histoire de l’Univers, du Big Bang à notre époque. Mais surtout, il est particulièrement exhaustif.

Le logo du projet FLAMINGO
© FLAMINGO Project / Virgo consortium

Une grande partie des simulations actuelles se concentrent uniquement sur la répartition de la matière noire, qui est suspectée d’être majoritaire dans l’univers. Mais selon les auteurs, c’est une grosse erreur d’exclure la matière baryonique — c’est-à-dire la matière ordinaire — de l’équation. Car en faisant abstraction de sa présence, les astronomes pourraient rater certains éléments fondamentaux de la dynamique du cosmos.

« Même si la matière noire domine la gravité, la contribution de la matière noire ne peut plus être négligée », explique Joop Schaye, professeur à l’Université de Leiden aux Pays-Bas.

Pour combler cette lacune, les chercheurs se sont attaqués à un projet particulièrement ambitieux. Ils ont fait turbiner le supercalculateur COSMA 8 de l’université britannique de Durham pendant deux ans afin de simuler l’évolution de la structure de l’Univers. Si l’on met bout à bout le temps de travail individuel de chacun des 67 584 processeurs de l’engin, on obtient un temps total supérieur à … 50 millions d’heures de calcul.

Pour y parvenir, ils ont dû prendre en compte une foule de facteurs comme la matière noire, mais aussi la matière ordinaire, les neutrinos, et des phénomènes tels que les vents galactiques. Or, pour réaliser une simulation aussi complexe, il ne suffit pas de donner quelques équations à la machine et de la laisser travailler. Il faut impérativement lui donner quelques lignes directrices supplémentaires. Autrement, même toute la puissance de calcul de la Terre ne suffirait pas à produire un modèle aussi large dans un temps raisonnable.

Afin d’aider la Cosmology Machine dans ce travail de titan, les chercheurs ont eu recours au machine learning. Cette technologie leur a permis de créer une grande base de référence à partir des observations d’un tas d’observatoires de pointe.

Grâce à ces éléments, les chercheurs ont pu réaliser un total de 28 simulations différentes de l’Univers depuis sa genèse, en faisant varier différents paramètres comme la proportion de matière noire, la masse des neutrinos, ou encore la répartition des étoiles dans les différentes catégories.

Une formidable ressource pour les astronomes

En comparant tous ces éléments aux vraies observations, ils pourront procéder par élimination pour vérifier quelles valeurs sont les plus proches de la réalité. Ils pourront alors exploiter les simulations les plus prometteuses pour déterminer à quel point les modèles actuels sont cohérents, et s’ils prédisent correctement le comportement de la matière.

Et ce travail pharaonique a déjà commencé à payer. Ces modèles vont contribuer de façon très concrète aux travaux de certains instruments de pointe. On peut notamment citer Euclid, le dernier télescope de l’ESA. Son objectif est de réaliser une carte 3D de la distribution de milliards de galaxies, afin d’étudier l’influence de la matière noire sur la structure de l’Univers. Pour les projets de ce genre, ces simulations sont du pain béni.

« À tous les niveaux, ces simulations sont à la pointe de ce qui se fait actuellement », estime Koen Kuijken, un membre du consortium Euclid cité par le site spécialisé Sky And Telescope (SaT). « Euclid a absolument besoin de ce genre de simulations. Elles font le pont entre les paramètres fondamentaux de l’Univers et les observations du télescope », précise-t-il.

Plus précisément, ces simulations permettront de progresser sur deux questions centrales de la cosmologie moderne. La première concerne la vitesse d’expansion de l’Univers. Il existe un écart considérable entre la valeur prédite par la théorie et celle que l’on observe en pratique. Cette incohérence, parfois appelée tension de Hubble, pourrait être la clé de nombreux mystères de l’Univers.

Selon SaT, elles offrent aussi un nouvel angle d’attaque pour résoudre une autre vieille énigme : l’Univers tel que nous l’observons est moins granuleux, plus diffus que ce que suggèrent les modèles théoriques. Les physiciens ont appelé cet écart la tension S8.

« Pour comprendre ce qui se cache derrière les tensions S8 et de Hubble, nous devons vérifier s’il n’y a pas de biais dans nos analyses statistiques. Les simulations jouent un rôle fondamental à ce niveau », explique Cañas Herrera, un autre astronome cité par SaT.

Il conviendra donc de suivre attentivement les différents travaux qui vont se baser sur ces immenses simulations, car ils pourraient révéler certains des secrets les mieux gardés de notre monde.

Les trois premiers papiers de recherche issus du projet FLAMINGO sont disponibles, ici, ici et .

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