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Voici le plus petit accélérateur de particules au monde

Ce minuscule accélérateur d’électrons nanophotonique tient sur une pièce d’un centime, et une fois mature, il pourrait devenir un outil très intéressant en médecine.

Des chercheurs allemands et américains ont récemment signé un tour de force technique assez impressionnant : pour la première fois, ils ont réussi à faire fonctionner un minuscule accélérateur de particules, d’une taille largement inférieure à tous les autres appareils de ce genre. Une preuve de concept qui laisse entrevoir de belles avancées dans diverses disciplines.

Les accélérateurs de particules sont aujourd’hui des outils très importants dans de nombreuses branches de la recherche scientifique. La physique fondamentale, bien entendu, mais aussi la science des matériaux, la médecine, l’énergie, l’astrophysique, et ainsi de suite.

Des machines généralement très encombrantes

Leur principale limite, c’est qu’il s’agit généralement d’engins massifs. Les plus petits d’entre eux, qui sont couramment utilisés en imagerie médicale ou en radiothérapie, mesurent déjà quelques mètres carrés. Les plus performants peuvent même s’étendre sur des kilomètres. Et forcément, toutes les institutions ne peuvent pas se permettre de construire de tels bijoux de technologie.

Pour faciliter l’accès des laboratoires à ces machines formidables, il est donc nécessaire d’en réduire l’encombrement, la taille et le prix. Dans ce contexte, plusieurs équipes ont déjà tenté de produire de minuscules accélérateurs à électrons basés sur des lasers. Mais jusqu’à présent, aucun d’entre eux n’a été capable d’accélérer ces particules de façon substantielle.

Mais ce mois-ci, ces chercheurs des universités d’Erlangen-Nürnberg en Allemagne et de Stanford aux États-Unis ont enfin réussi à franchir cette barrière. À travers une étude publiée dans le prestigieux journal Nature et repérée par Space.com, ils ont démontré pour la première fois la viabilité d’un minuscule accélérateur de particules qui, une fois mature, pourrait s’avérer très utile en médecine.

Les chercheurs allemands ont réalisé la première avancée majeure dans ce domaine il y a deux ans. À l’époque, ils ont réussi pour la première fois à contrôler la trajectoire d’un flux d’électrons dans une chambre à vide. Pour y parvenir, ils ont utilisé une technique appelée alternating-phase focusing (AFP), qui repose sur un ensemble de lasers.

Canaliser ainsi les particules est le premier prérequis de ces machines. À ce stade, les chercheurs n’avaient plus qu’à leur transmettre de grandes quantités d’énergie en les accélérant à une vitesse prodigieuse.

Le premier accélérateur de particules sur puce

Et c’est ce qu’ils ont enfin réussi à faire après deux ans de travail acharné. « Grâce à cette technique, nous avons réussi non seulement à guider les électrons, mais aussi à les accélérer dans des nanostructures », explique Stefanie Kraus, co-autrice de ces travaux.

Pour y parvenir, ils ont conçu un engin appelé accélérateur d’électrons nanophotonique (ou NEA, pour nanophotonic electrons accelerator). Il s’agit d’une toute petite puce de la taille d’une pièce d’un centime qui héberge un minuscule tube à vide, lui-même constitué de milliers de « piliers » nanométriques.

Le tube où se déroule l’accélération mesure environ un demi-millimètre. C’est incroyablement petit, surtout par rapport aux accélérateurs de pointe. Pour référence, l’accélérateur le plus connu et le plus performant de la planète, le Large Hadron Collider du CERN, a recours à un gigantesque circuit d’aimants supraconducteurs de… 27 kilomètres !

© Samuel Joseph Hertzog – CERN

Malgré cette différence de taille, ce petit accélérateur a réussi à inculquer une énergie significative aux électrons. « Nous avons gagné environ 12 kiloelectron volts (keV), soit un gain d’énergie d’environ 43 % » explique le co-auteur Leon Brückner.

Dans l’absolu, c’est un chiffre relativement modeste. À titre de comparaison, au sein du LHC, les particules atteignent une énergie supérieure à 13 TeV, soit un milliard de fois plus que les électrons dans le petit NEA. Mais lorsqu’on tient compte de sa taille, c’est un exploit technique de premier ordre. « Pour la première fois, nous pouvons vraiment parler d’accélérateur de particules sur puce », se réjouit Roy Shiloh, un autre co-auteur de l’étude.

Un concept très prometteur en médecine

Et surtout, les chercheurs sont convaincus qu’il ne s’agit que d’un début. Leur but est d’améliorer les performances du NEA pour qu’il dépasse le stade de preuve de concept. Ils espèrent pouvoir multiplier le gain d’énergie par 100. Et s’ils y parviennent, le petit accélérateur aura désormais un vrai intérêt pratique.

Ici, il ne s’agirait pas de physique fondamentale; pour étudier la matière, il faut atteindre des niveaux d’énergie bien plus importants, comme ceux proposés par le LHC. En revanche, il pourrait par exemple être utilisé dans des thérapies par radiations pour traiter des personnes atteintes de cancers.

« Le scénario de rêve, ça serait de placer l’accélérateur de particules sur un endoscope pour administrer de la radiothérapie directement au niveau de la zone affectée », explique Tomáš Chlouba, auteur principal de l’étude. Cela permettrait de cibler les tumeurs avec une grande précision afin d’augmenter l’efficacité du protocole, tout en diminuant les dégâts sur les tissus sains.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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