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ESA : une sonde capture l’énigmatique lueur nocturne de Mars

Le Trace Gas Orbiter a découvert que l’atmosphère de la Planète rouge brille dans le domaine visible pendant la nuit, comme celle de la Terre. Une découverte qui pourrait apporter de nouvelles informations utiles pour les futures missions martiennes.

Il n’y a pas que sur Terre que le ciel brille pendant la nuit. Pour la première fois, la sonde Trace Gas Orbiter (TGO) de l’ESA a capturé le phénomène d’airglow, ou lueur de l’air en français, autour de la planète Mars. Une observation qui pourrait déboucher sur de nouvelles découvertes concernant l’atmosphère de la Planète rouge, avec des implications potentielles pour son exploration.

Cette lueur de l’air est exactement ce que suggère l’intitulé : dans certaines conditions, les atomes de l’atmosphère supérieure émettent une lumière diffuse qui éclaire le ciel nocturne. C’est à cause de cet airglow que le ciel terrestre n’est jamais entièrement noir, même en faisant abstraction de la lumière du Soleil qui se propage depuis l’autre côté de la Terre.

Airglow Terre Iss
La lueur de l’air nocturne terrestre vue depuis l’ISS. © NASA/Scott Kelly

Tous les mécanismes qui génèrent cette lueur ne sont pas encore parfaitement compris. C’est d’ailleurs pour cette raison que des chercheurs ont récemment généré un airglow artificiel en Alaska, afin d’étudier le mécanisme en profondeur.

Une lueur insaisissable

Pendant la journée, les rayonnements en provenance du Soleil excitent des molécules de dioxyde de carbone, de l’atmosphère martienne ce qui les pousse à se désagréger. On obtient ainsi des atomes de carbone et d’oxygène. Cette séparation produit une légère lueur qui a été observée pour la première fois en 2020.

En revanche, ce rayonnement a lieu à haute altitude (environ 150 km), et il ne concerne que la partie éclairée de Mars. Il n’a donc que peu d’intérêt pour les chercheurs qui étudient la dynamique de l’atmosphère martienne. Pour obtenir des informations plus intéressantes, il faudrait travailler sur une lueur comparable à une altitude moins élevée, autour des 50 km d’altitude.

La sonde Mars Express avait déjà observé de tels rayonnements dans le domaine de l’infrarouge il y a une dizaine d’années. Mais jusqu’à tout récemment, il n’y avait aucune preuve que cet airglow martien s’aventurait également dans le domaine du visible.

Un intermédiaire pour étudier l’atmosphère

Cela a changé grâce au NOMAD, le capteur UV-visible du Trace Gas Orbiter. L’ESA a enfin pu observer un airglow nocturne dans le domaine du visible pour la première fois.

L’origine de cette autre lueur est légèrement différente. Elle est intimement liée aux atomes d’oxygène issus de la décomposition du CO2 mentionnée ci-dessus. Ces atomes migrent dans l’atmosphère au gré des vents jusqu’à atteindre la face non éclairée de la planète. Lorsqu’ils passent ainsi dans l’ombre, les atomes d’oxygène ont tendance à se combiner au contact du CO2 pour former une molécule de dioxygène dans un état excité. Cette énergie superflue est ensuite relarguée, ce qui se manifeste par la production de lumière.

Cette découverte pourrait sembler anecdotique, mais elle pourrait avoir des retombées significatives pour les planétologues. En effet, cette lueur de l’air peut servir d’intermédiaire pour étudier différents processus chimiques et physiques. À travers cet airglow visible, les chercheurs pourront étudier la composition et la dynamique de l’atmosphère martienne dans une région où les engins actuels ont traditionnellement du mal à réaliser des mesures précises.

« L’étude de ces émissions est un excellent outil pour étudier la composition et la dynamique de l’atmosphère de mars entre 40 et 80 km », explique Benoit Hubert, chercheur à l’Université de Liège.

Une ressource pour les futures missions martiennes

Au-delà des enjeux en science fondamentale, ces mesures pourraient aussi contribuer directement au succès des futures missions martiennes. « Ces nouvelles observations sont inattendues et très intéressantes pour les prochains voyages vers la Planète rouge », se réjouit Jean-Claude Gérard, chercheur à l’Université de Liège et auteur principal de ces travaux.

Par exemple, la lueur de l’air peut être exploitée pour estimer localement la densité de l’atmosphère. Il s’agit d’une donnée très importante pour les différents appareils utilisés dans l’étude de Mars.

En premier lieu, elle affecte directement la trajectoire des engins positionnés en orbite. Plus elle est élevée, plus les satellites doivent faire face à une friction importante. Sur le long terme, il est donc indispensable d’en tenir compte pour corriger leur trajectoire de façon adéquate, afin qu’ils ne plongent pas vers la surface prématurément.

Les rovers et autres équipements de surface peuvent aussi tirer parti de ces informations. L’atmosphère de Mars a beau être beaucoup moins dense que celle de la Terre, elle est tout de même assez présente pour permettre aux engins de se poser à l’aide de parachutes. Or, leur capacité à ralentir la chute des objets dépend directement de la densité de l’atmosphère. Étudier la lueur de l’air pourrait ainsi aider les ingénieurs à peaufiner le déploiement des prochains véhicules d’exploration.

Il ne reste donc plus qu’à étudier cet airglow de plus près. Et la bonne nouvelle, c’est que selon les auteurs de l’étude, il sera assez facile d’y parvenir. « L’intensité de cette lueur du ciel nocturne est telle que des instruments relativement simples et peu chers pourraient l’utiliser pour étudier les flux atmosphériques. Une future mission de l’ESA pourrait aisément emporter une caméra pour l’enregistrer à l’échelle globale », conclut Gérard.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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Source : ESA

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