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[Dossier] Power Rangers et pop culture des années 90 : pourquoi un tel succès ?

Quand on vous parle des Power Rangers, vous pensez à quoi ? Si vous faites partie de ceux qui ont instantanément le générique de la série…

Quand on vous parle des Power Rangers, vous pensez à quoi ? Si vous faites partie de ceux qui ont instantanément le générique de la série originale qui démarre à fond dans la tête, qui connaissent les chorégraphies de transformation par cœur, les prénoms des protagonistes et ont déjà porté un vieux paquet cartonné de lessive en guise d’armure en défonçant des immeubles en Lego à coup de pied, alors vous êtes probablement comme moi, fans de Sentais. C’est grave, docteur ?

En 1993, quand débute Mighty Morphin Power Rangers, personne ne s’attend vraiment à ce que le phénomène explose comme il va le faire. Personne à part sans doute Saban, qui lui cherchait à vendre le projet depuis plusieurs années. D’autant que les Power Rangers sont avant tout un concept hybride et totalement nouveau. Acheter des droits de diffusion, d’exploitation et de modification d’une série japonaise hyper localisée pour en faire une série américaine au croisement entre Beverly Hills et les X-Men, c’est alors du jamais vu. Et pourtant, ça va fonctionner direct, et les kids (et tout un tas d’ados et d’adultes) vont tomber sous le charme de cette série colorée et pop.

Il faut dire que le programme a tout pour plaire : Un casting hétéroclite où l’on retrouve tous les clichés de base du groupe d’ados des années 90 : de la jolie nana populaire au sportif de service, en passant par l’intello, sans oublier le quota de « minorités ethniques », les Power Rangers permettent à toute une génération de garçons et filles de s’identifier. Mais aussi de la baston, des monstres en pagaille et des véhicules trop cools qui se transforment et s’assemblent en un robot gigantesque de plusieurs mètres, capable de défoncer des immeubles comme s’ils étaient en polystyrène. Oh, wait….

Super héros à mi-temps, nos héros sont généralement entourés d’un panel de personnages absurdes, portent des costumes en spandex avec fermetures apparentes, font des bonds improbables dans les airs et affrontent des monstres aux costumes dignes d’une convention de Kaiju. Mais alors, qu’est-ce qui fait que ça plaît ? Que la série ait pu totaliser plus de 24 saisons et fonctionne toujours autant, au point qu’un blockbuster soit sur le point de sortir au ciné ? Bah calmez-vous, j’explique.

[nextpage title=”Millième degré”]

Déjà, une des premières choses qui font la force de la saga Power Rangers, c’est tout simplement son autodérision assumée. Haïm Saban l’a dit lui-même, les Power Rangers, c’est du grand n’importe quoi, ça n’a aucun sens, mais c’est divertissant. Bien sûr, on trouve encore aujourd’hui une majorité de personnes qui ignorent en fait tout de ce qu’est au départ le Super Sentai et la culture du Sentai, et qui s’imaginent que les Power Rangers, c’est super sérieux, et du coup super nul. La taille de la poutre dans l’œil, je ne vous raconte pas.

Pour faire très court sur les origines, au Japon, les séries Super Sentai (dont sont dérivées les séries Power Rangers) sont faites – et uniquement faites – pour vendre du produit dérivé. Super Sentai, et a fortiori Power Rangers, c’est un peu les Tortues Ninja ou les Maîtres de l’Univers des années 90 : Une pub de 25 minutes pour vendre du jouet. S’il on veut parvenir à apprécier l’œuvre, il est important d’en avoir conscience et de l’accepter. En effet, qui peut vraiment prétendre que cette série se prenne au sérieux ? On parle de zouaves en collants qui agitent les bras dans les airs en tentant des coups de pied vrillés et en sautant sur des trampolines hors champ, pour coller des peignées à des monstres en mousse. C’est Kitsch à mort, et c’est justement ce qui fait tout le charme et toute la force de cette franchise. Sérieux, dans la saison Power Rangers RPM, un des véhicules a une tête de chat !

[nextpage title=”Tatane et pyrotechnique”]

Mais bien entendu, l’univers des Power Rangers ne se cantonne pas qu’à cet aspect kitshissimme et il serait réducteur de le penser. Cela reste une série d’action, avec bien souvent des combats de qualité, bien mieux chorégraphiés que dans certains films. Et puis bon, un mec ou une nana en costume de Sentai fluo, qui vient de faire un bond de douze mètres de haut, trois vrilles, coller un coup de pied sauté à un streum, l’envoyant balader au second plan contre une citerne qui explose au moment même où notre héros/héroïne pose un genou au sol, au premier plan, face caméra, bah ça en jette.

Et puis parlons-en, d’ailleurs de ces monstres. Plusieurs centaines d’épisodes, et à chaque fois une nouvelle créature, toujours différente d’aspect des précédentes, ça force le respect. Et même si tous ne se valent pas, certains designs de monstres sont absolument géniaux et méritent à eux-seuls qu’on s’intéresse à cette saga. Mr Gooriffic, par exemple, qui utilise son tube de crème hydratante géante pour transformer les personnes sur qui il applique sa crème en animaux est une chose que vous devez voir au moins une fois dans votre vie. Il est d’ailleurs amusant d’essayer de deviner si le monstre du jour est une création japonaise pour les Super Sentai, ou s’il a été créé exclusivement pour Power Rangers (comme c’est le cas de certains monstres). Et quand il s’agit de créatures issues de la série japonaise et qu’on s’intéresse au traitement souvent très différent du monstre entre les deux versions, on fait parfois des découvertes intéressantes. Ou alors y’a que moi et je suis malade dans ma tête. Pfff. Vous dites ça parce que vous êtes jaloux.

[nextpage title=”J’habite une tour en carton plume”]

Autre aspect intéressant de la série Power Rangers : tous les épisodes « classiques » sont construits sur le même schéma. Un peu comme pour les chansons des Red Hot Chilli Peppers, tous les épisodes de Power Rangers sont construits de la même façon. Nos héros sont en train de chiller tranquillement quand un vilain streum ravage une partie de la ville / kidnappe des enfants dans un centre commercial / menace de faire exploser la centrale nucléaire la plus proche / fait caca sur un trottoir dans une impasse (au choix, en boucle). Ils partent alors affronter une horde de seconds couteaux, en civil, avant de se faire plier par le méchant du jour. Puis arrive la transformation en Power Rangers, re-baston, plus équilibrée, cette fois, puis le méchant triche, et devient super grand. Alors les Rangers font appel à leurs Zords, ces véhicules colorés et plus ou moins délirants, avant de les combiner en un seul gros robot (portant généralement une variante du nom Megazord). Re-re-baston, cette fois en utilisant des immeubles habités par des civils pour taper sur la face du monstre, parce que pourquoi pas, j’ai envie de dire. Puis le Megazord sort sa super épée de la mort qui tue, et transforme la vilaine créature infernale qui lui fait face (non, je ne parle pas de votre ex, cessez ce fantasme tout de suite) en kébab végétarien.

S’il on peut, a posteriori, se demander pourquoi les Rangers n’arrivent pas directement à bord de leur Megazord, épée à la main, pour se faire un Chamallow au feu de bois avec le monstre quand il a encore une taille normale, en plein épisode on ne se pose pas toutes ces questions. On est dans le feu de l’action, on kiffe, on rigole, et pendant quelques minutes, on a de nouveau huit ans. Et dans un monde comme celui d’aujourd’hui, ça devrait limite être pris en charge par la sécu.

[nextpage title=”Best friends forever”]

Mais tout le monde ne suit pas cette série que pour vivre une expérience… burlesque en compagnie de monstres étranges, de robots géants et d’ados en combi moulante, non. Ce qui plaît aussi dans Power Rangers, ce sont les valeurs qui y sont communiquées. Comme souvent dans les séries d’origine japonaise, on retrouve en effet certaines valeurs fortes, telles que l’esprit d’équipe, la valeur de l’amitié ou la camaraderie. Les Rangers sont avant tout des amis, et même si les acteurs ne s’entendent pas toujours dans la vraie vie, devant la caméra, ils envoient du rêve. Les filles du groupe ne sont jamais harcelées, ne se font pas lourdement draguer par les Rangers masculins, et tous semblent avoir comme désir le bien commun. À une époque où une partie de la véritable jeunesse s’identifie devant les Anges de la Télé ou considère que Jul est un « chanteur », il est bon de souligner qu’il existe encore des programmes avec de véritables valeurs.

L’éternel combat du bien contre le mal, l’allégorie du fait de devoir vaincre ses propres démons pour avancer, la peur de l’échec, mais le courage d’y aller, l’adversité, la perte de choses ou de personnes qui nous sont chères… tout y est. Alors oui, ces valeurs sont enrobées dans du lycra aux couleurs pétantes, mais au final, la forme importe peu. Et le fond d’une série comme Power Rangers, c’est que l’on inculque à de jeunes (et moins jeunes) spectateurs, qu’être un héros, ce n’est pas forcément porter un costume et tirer au pistolet laser. Être un héros est un acte que tout le monde peut effectuer, quotidiennement. C’est se dépasser, se transcender chaque jour. Et à défaut de coller des peignées à des monstres géants à bord d’un robot transformable, être un héros c’est aussi et surtout être honnête, courageux, respectueux et empathique. Et tout ça, on le retrouve dans la saga Power Rangers.

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