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[Test] Far Cry New Dawn : une ère de déjà-vu

Sur le papier, Far Cry New Dawn ressemble à une mauvaise blague de 2008. Cette année où Ubisoft avait décidé de sortir la véritable fin de Prince of Persia en DLC payant quelques semaines après la parution du jeu. L’humour n’a visiblement pas pris une ride chez Guillemot avec cette suite de Far Cry 5 qui aurait très bien pu faire partie du jeu original en tant qu’épilogue. La différence étant que, cette fois-ci, il y a presque une vraie proposition derrière.

Les raisons de la colère

Far Cry 5 n’était pas un excellent jeu. N’apportant rien à une formule installée depuis le troisième épisode, il n’avait pas grand chose à raconter non plus. Des élans de survivalisme, une critique timide des Etats-Unis et un doigt pointé vers le repli communautaire comme autant de réflexions mélangées sans message général. En revanche, un peu à l’image d’Assassin’s Creed Odyssey, il proposait un terrain de jeu réjouissant où tout semblait possible, sous la gouvernance d’une improvisation catapultée comme loi fondamentale.

D’autant que son cadre sauvage, particulièrement immersif, jouait en la faveur de cette expérimentation à ciel ouvert. Cette réussite du monde-ouvert amenait toutefois une contrepartie, à savoir une dilution de l’intérêt au fur et à mesure de la progression. Trop de choses à faire, trop d’espace, une avalanche d’événements, qui donnaient au jeu une image de boîte à jouets fourre-tout. A tel point que le jeu trouvait sa force dans l’exploration pure, sans but. De la randonnée fantastique mais qui finissait tout de même par se vider de son sens une fois l’aventure bouclée, tant le endgame laissait sur sa faim.

Far Cry New Dawn propose justement de profiter de cet “après”, dans une région ravagée par un hiver nucléaire. 17 ans après le coup de folie prémonitoire de Joseph Seed, la nature a repris ses droits comme si les retombées radioactives n’avaient été qu’un crachin breton et l’humanité s’est décidé à mettre le nez hors des bunkers disséminés dans les collines boisées. De manière générale, à part des sangliers fluorescents et des truites de 2 mètres, tout s’est plutôt bien passé. L’irradiation s’est même permise une petite coquetterie en habillant de rose bois de cerfs et herbes folles. C’est dans ce Mad Max en pleine montée d’acides que le joueur incarne un flic désormais leader d’une rébellion contre deux jumelles machiavéliques. Rien à voir avec Far Cry 5 où le héros est un shérif désormais leader d’une rébellion contre plusieurs membres d’une secte machiavélique. Heureusement, le recyclage n’est pas aussi marqué que le pitch le laisse penser.

L’affaire de jumelles

Il s’agit toujours bien évidemment d’un FPS en monde ouvert avec une dimension crafting et de la conduite de véhicule sans aucun permis. Mais Far Cry New Dawn est une version dégraissée de son prédécesseur. Par l’abandon d’un systématisme pénible où chaque zone devait être libérée de son boss en plusieurs étapes, le jeu gagne en efficacité. Mieux il devient plus organique, tant dans sa narration que dans la progression du joueur. Toutes les rencontres avec les jumelles se font de façon linéaire, avec des missions dédiées, chacune reposant sur une épreuve différente.

Rien de nouveau dans le monde du FPS, mais la diversité des phases relance l’intérêt de façon régulière, le tout agrémenté de missions de sauvetage de vieilles connaissances, elles aussi variées, qui pourront rejoindre les rangs de la résistance. De quoi remporter des armes uniques ou des tenues spéciales. Les quêtes s’enchaînent, sans temps mort, avec juste ce qu’il faut d’activités annexes pour passer le temps, de la pêche à la chasse d’animaux rares, dans la pure tradition de la série.

Pourquoi donc y dénicher un plaisir renouvelé ? Tout simplement parce que la carte de la région est désormais trois fois moins étendue, espace amplement suffisant pour trouver de quoi s’amuser. Et ce sans écraser le joueur par un remplissage forcé devant cette crainte toujours présente de l’absence d’activité sur le moindre mètre-carré. New Dawn, à l’instar de Blood Dragon en un sens, a amorcé sa transformation en jeu d’arcade léger au propos certes toujours foutraque, mais bien plus détaché d’une sorte de message subversif mal maîtrisé.

Ce futur dévasté est incarné et offre avec surprise une vraie aventure bien menée. Toujours mal écrite par contre, là moins d’étonnement. Il faut se faire une raison du côté de chez Ubisoft sur le sujet. La proposition semble donc alléchante, et le prouve une bonne partie du temps. Vous le voyez venir, il a fallu que la dernière marotte de l’éditeur/développeur vienne casser cette jolie nature morte.

Jeu de tôles

Le problème dans la réduction de la carte de Far Cry New Dawn est l’impact sur la vitesse de progression du joueur. Avec des armes disponibles rapidement et l’accès à de nombreux véhicules, il est aisé d’aligner les missions et d’aller défier les jumelles en plein trip moto-cross en une double dizaines d’heures. La solution est alors de créer des paliers, afin de ralentir l’avancée. Cela peut passer par la perte de compétences, d’objets, par un rebondissement scénaristique ou par une gradation de la difficulté par exemple.

Mais en ce moment, Ubisoft aime donner à ses productions des faux airs de RPG. Conséquence directe, les ennemis disposent de points de vie, dans un style à la The Division, qui augmentent au fur et à mesure des missions passées. Le souci principal vient alors du fait que le joueur n’a pas forcément accès à un large panel de meilleures flingues au même rythme. Pour cela, il est obligatoire d’augmenter le niveau de l’établi d’armes situé dans la base récupérée au tout début du jeu. Bâtiment dans lequel réside bien d’autres pôles à améliorer, qui confèrent notamment plus de vie, des véhicules plus performants, etc.

L’astuce réside dans la ressource nécessaire à tous ces upgrades : l’éthanol. Sauf qu’il ne se trouve pas sur les arbres, à la différence des poussières radioactives. Denrée très rare, elle ne s’obtient que dans des caisses larguées au petit bonheur la chance sur la zone de jeu, lors de missions de collecte sur un porte-avion, ou suite à la capture de places-fortes. Preuve d’un déséquilibre profond de game-design, ces lieux peuvent être laissés aux ennemis pour ensuite être repris face à des adversaires renforcés afin d’engranger plus d’ethanol.

Il y a donc des séquences de farming forcés dans un FPS qui se veut efficace. Car autant il est possible d’atteindre la fin avec des armes de niveau II par quelques ruses de vieux briscard, autant les derniers boss ont une résistance de char d’assaut. La courbe de difficulté est si abrupte que l’on en vient à se poser des questions existentielles sur ses choix de vie, devant une souris immobile et les mains encore moites posées, inertes, près du clavier. Ce choix de progression artificiel plombe un épisode qui ne le méritait pas. Car sous cette couche inutile demeure un jeu agréable à l’univers original, bien plus à même de charmer qu’un Far Cry 5 empesé.

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Notre avis

Portant bien son nom, Far Cry New Dawn est l’étincelle qui ravive la flamme de Far Cry 5. Avec cette suite directe, Ubisoft semble avoir compris en partie les soucis de rythme et de progression de ce dernier. Plus efficace et dégraissé, New Dawn va à l’essentiel, sans s’empêtrer dans une narration qui bégayait sans cesse. Quasiment arcade, ce FPS ouvert propose une variété de situations appréciables, enchaîne des missions classiques mais bien pensées et ne s’appesantit pas sur les activités annexes. S’il s’en était tenu à ce statut de petite aventure agréable et décomplexée, il aurait pu s’en tirer avec les honneurs. Pourtant, dans un souci de légitimer cette nouvelle aventure et de ne pas en faire un simple DLC à 10 €, Ubisoft est venu intégrer une composante RPG complètement artificielle. Cet ajout alourdit tellement la pauvre structure de New Dawn, qu’elle se brise dans les dernières heures, éreintée par du farming obligatoire. Et la présence d’un lance-scie réjouissant n’y changera rien, difficile de redonner du peps au jeu une fois que cette logique en a imprégné le moindre élément.
Note : 6  /  10

Les plus

  • Le monde de l’après catastrophe, réussi et immersif
  • Le look et le feeling des armes
  • Un jeu dégraissé, plus efficace
  • Des missions variées
  • Les divers pouvoirs assez jouissifs
  • Joli travail sur le sound-design
  • Quelques rares bonnes idées de scénario...

Les moins

  • ... mais un ensemble très anecdotique
  • Le côté RPG qui casse la formule
  • Le postulat de départ identique
  • Les dialogues, au secours
  • Encore et toujours les bases à capturer
  • L’I.A alliée défaillante
  • Celle des ennemis également
2 commentaires
  1. Ça va, oklm l’image de promotion avec deux noires qui s’apprêtent à exécuter un blanc. J’ose pas imaginer l’indignation si les couleurs étaient inversées.

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