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Épidémie : comment World of Warcraft aide aujourd’hui la recherche scientifique

En 2005, le monde virtuel de World of Warcraft a vécu une épidémie accidentelle tellement désastreuse que le jeu a dû être redémarré. 15 ans après, l’incident du sang vicié inspire des épidémiologistes dans leur quête afin de mieux prédire les comportements humains en situation de pandémie.

Crédits : Blizzard.

Alors que l’épidémie de COVID-19 est devenue une pandémie, de nombreuses personnes à travers le monde se sont ruées – souvent de manière complètement irraisonnée – sur des produits de première nécessité comme du papier-toilette. D’autres refusent de considérer la crise sanitaire comme il se doit et ne respectent pas les gestes barrières nécessaires pour limiter la propagation de la maladie. La diversité et la complexité des réactions humaines face à la pandémie actuelle comporte de nombreux points communs avec les événements qui se sont déroulés virtuellement au cours d’une autre pandémie, en 2005.

L’incident du sang vicié

En septembre 2005, l’éditeur vidéoludique Blizzard introduit un nouveau donjon dans l’univers de son MMORPG, World of Warcraft. Ce niveau, appelé Zul’Gurub, a pour cible les joueurs expérimentés, avides de défis plus ardus. En effet, le boss de ce donjon, Hakkar, l’Écorcheur d’âmes, possède un sort d’empoisonnement, le “sang vicié”, qui diminue régulièrement la santé des joueurs qui le subissent. Ce “débuff” est contagieux et ne s’interrompt que si les joueurs parviennent à vaincre Hakkar. Seulement voilà, le virtuel n’est pas exempt d’erreurs et de bugs. Alors qu’ils ne sont pas censés pouvoir le quitter, des joueurs paniqués se téléportent en dehors du donjon et fuient dans le monde extérieur. Cette erreur dans la restriction de mouvement des joueurs s’imbrique parfaitement avec un bug imprévu : les PNJ (personnages non-joueurs), comme les compagnons, montures et familiers, peuvent, eux aussi, être contaminés.

Rapidement, des centaines d’avatars virtuels perdent la vie. Certains, qui possèdent des capacités de soigneur, tentent d’enrayer l’infection mais ne font que retarder l’inévitable – le sort ne s’interrompant pas tant que le personnage infecté n’est pas venu à bout d’Hakkar ou a perdu la vie. Malgré les mesures de quarantaine imposées par les développeurs, d’autres joueurs font les malins et contractent la maladie, par curiosité ou par malveillance, facilitant sa propagation. Face au désastre, Blizzard décide de supprimer le donjon et de redémarrer trois serveurs internationaux, un mois plus tard.

Mieux prédire les comportements humains

En 2007, deux épidémiologistes de l’université Tufts de Boston (dont un joueur de WoW) s’y intéressent et publient une étude complète sur la question dans la prestigieuse revue scientifique et médicale, The Lancet Infectious Diseases. Aujourd’hui, les deux chercheurs exploiteraient leur analyse passée pour formuler les modèles prédictifs les plus riches en matière de comportement humain – un outil majeur dans le cadre d’une lutte contre l’évolution d’une épidémie – en particulier concernant la perception du risque d’un point de vue sociétal.

“Trop souvent, nous considérons une épidémie comme un virus qui infecte des personnes, mais en réalité, une épidémie provient d’abord du fait que des personnes se transmettent le même virus, en interagissant et en se comportant d’une façon ou d’une autre”, a récemment souligné l’un des deux chercheurs, Eric Lofgren, à PC Gamer. Ainsi, ce dernier explique que les épidémies ont un caractère imprévisible et chaotique, à l’image des comportements humains qui la composent. “Nous avons besoin de mieux prédire leur complexité et, par exemple, de ne pas juste considérer que tout le monde se mettra en quarantaine comme il se doit. Sans modèle prédictif assez riche pour lutter contre une épidémie, ce serait comme de se débarrasser des sismologues simplement parce que les tremblements de terre sont très rares. Car, un jour ou l’autre, il y en aura forcément un.”

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