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Des chercheurs ont transmis de l’énergie solaire vers la Terre depuis l’espace

Une grande première qui pourrait accélérer les travaux sur cette technologie potentiellement révolutionnaire qui présente un défi technique énorme.

Les Américains du prestigieux California Institute of Technology, plus connu sous le nom de Caltech, viennent d’apporter une preuve de concept remarquable : pour la toute première fois, ils ont réussi à transmettre sans fil de l’énergie solaire produite directement en orbite grâce à un petit prototype de ferme photovoltaïque spatiale.

Le concept en lui-même n’a rien de nouveau ; cela fait plusieurs décennies que le concept intéresse l’industrie de l’énergie. Sur le papier, cette approche présente des avantages évidents. Par exemple, une ferme solaire orbitale à l’échelle de la planète pourrait fonctionner 24 heures sur 24, et avec un rendement plus important que sur Terre puisque l’atmosphère est extrêmement fine à ces altitudes. De nombreux spécialistes considèrent y voient une piste très intéressante pour lutter contre la crise climatique.

Mais malgré ces avantages théoriques, ce concept est aussi très complexe à mettre en place d’un point de vue technique, et nous n’avons pas la moindre garantie qu’une telle infrastructure serait viable économiquement. Il reste aussi des tas de questions sur le bénéfice écologique réel de l’opération.

Pour ces raisons, les projets de ce type ont quasiment tous été abandonnés, même si l’idée est régulièrement revenue à la mode. Mais cette fois, alors que la menace climatique se fait de plus en plus pressante, la NASA veut être fixée une bonne fois pour toutes. Elle s’est donc associée aux chercheurs de Caltech pour produire la première preuve de concept opérationnelle.

MAPLE, le premier démonstrateur opérationnel

Et c’est le fruit de cette collaboration, un satellite baptisé MAPLE qui est à l’origine de cette grande première. Cet engin embarque deux séries de panneaux solaires reliées à un redresseur qui permet de convertir l’énergie récoltée en courant continu.

Ce dernier est ensuite redirigé vers un assortiment de petits transmetteurs à micro-ondes flexibles et ultralégers qui se déroulent une fois l’appareil en place. Ils sont pilotés par un ensemble de microcontrôleurs spécialement créés pour l’occasion. L’objectif est de faciliter le déploiement pour réduire autant que possible le coût de l’appareil. C’est une donnée extrêmement importante pour envisager une utilisation à grande échelle de cette technologie.

Le communiqué de Caltech explique que ces transmetteurs génèrent des motifs d’interférences qui permettent de rediriger le faisceau dans une direction précise, le tout sans la moindre pièce mobile. Cela permet de focaliser le rayon pour qu’il touche uniquement le récepteur avec un haut degré de précision.

C’est une approche très délicate qui nécessite un travail de calibration énorme. Si les chercheurs ont pris cette peine, c’est parce que cela limite grandement les risques liés à une défaillance mécanique. C’est évidemment crucial pour ces appareils où la maintenance est très difficile, pour ne pas dire inenvisageable à l’heure actuelle.

La première transmission d’énergie solaire vers la Terre

Et cela a fonctionné. Lors de leur premier test en conditions réelles, ils sont parvenus à expédier de l’énergie récoltée en orbite vers un récepteur situé sur le campus de Caltech, à Pasadena.

Le récepteur qui a collecté l'énergie solaire envoyée par le satellite Maple
Le récepteur qui a collecté l’énergie solaire envoyée par le satellite Maple. © Ali Hajimiri via Caltech

Ils n’ont pas pris la peine de préciser quelle quantité d’énergie ils avaient réussi à récupérer. On peut donc s’attendre à ce que le rendement était assez faible. Mais c’est tout de même la première fois que cette technologie est ainsi testée en conditions réelles. Et la bonne nouvelle, c’est que le rayon s’est comporté comme prévu. Il est arrivé au moment attendu, et les propriétés de l’onde étaient conformes aux modélisations des chercheurs. Dans l’absolu, cela représente une avancée significative.

« Personne n’a jamais démontré un transfert d’énergie sans fil depuis l’espace, même avec de grosses structures rigides très chères », explique Ali Hajimiri, ingénieur à Caltech et co-directeur du programme. « Nous avons réussi à le faire avec une structure flexible et légère, et avec nos propres circuits intégrés », se réjouit-il.

Seulement un premier pas

Avec son équipe, il espère désormais que ces travaux vont servir de tremplin à une véritable révolution énergétique. « De la même façon que l’Internet a démocratisé l’accès à l’information, nous espérons que ces transferts d’énergie sans fil pourront démocratiser l’accès à l’énergie », suggère Hajimiri. « Aucune infrastructure particulière [à l’exception du récepteur, NDLR] ne sera nécessaire pour recevoir cette énergie. Cela signifie que nous pouvons l’envoyer dans des zones reculées, ou des régions dévastées par la guerre et les catastrophes naturelles ».

Mais avant d’en arriver là, il va falloir mettre les bouchées doubles. Cette preuve de concept est encourageante, certes. Mais elle ne suffit largement pas à répondre à la plupart des questions qui persistent encore.

Pour commencer, il serait déjà intéressant de connaître le rendement de l’opération. Il faudra d’ailleurs tenir compte du déploiement qui nécessite de lancer une fusée. En cas de succès, il faudra ensuite vérifier si un tel système serait viable à grande échelle. Et ce n’est encore qu’un début.

Même si la technique suit, il faudra s’assurer que le bénéfice écologique est bien réel. Il devra aussi être suffisant pour justifier d’encombrer encore davantage l’orbite terrestre. Et même si toutes ces cases sont cochées, il faudra encore convaincre les investisseurs et les régulateurs. La dernière étape sera de construire un nouveau modèle commercial à partir de rien et convaincre le grand public. Tout un programme.

Vous l’aurez compris, Caltech a encore du pain sur la planche. Il conviendra donc de suivre les expériences de l’institut avec une attention toute particulière. D’ici quelques années, ce programme nous permettra sans doute d’y voir plus clair sur la viabilité de ce concept ô combien ambitieux.

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