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Des chercheurs débusquent plus de 100.000 nouveaux virus, dont 9 coronavirus

Les bases de données génomiques existantes regorgent d’indices potentiels sur les futures épidémies qui pourraient frapper l’humanité.

En l’espace de quelques mois, le SARS-CoV-2 et ses multiples variants ont semé une pagaille sans précédent à l’échelle de notre planète, si bien que plus de deux ans après le début de la pandémie, nous ne sommes toujours pas sortis du pétrin. Mais alors qu’un semblant de sortie de crise semble enfin se dessiner à l’horizon, les virologues ont retenu la leçon; ils cherchent désormais à anticiper l’arrivée des prochaines menaces. C’est l’objet des travaux d’une équipe américaine repérés par Futura; ses chercheurs viennent de découvrir plus de 100.000 nouveaux virus – dont neuf coronavirus.

Ce sont des travaux fondamentaux”, affirme sans détour le bioinformaticien Rodney Brister, non affilié à l’étude. “Cela démontre à quel point nous manquons de connaissances sur ce groupe d’organismes”, explique-t-il dans la même interiew au prestigieux journal Science.

Pour y parvenir, le bioinformaticien Artem Babaian et l’expert en informatique haute performance Jeff Taylor ont commencé par moissonner une quantité invraisemblable de données génomiques collectées par des chercheurs de tous horizons pendant des années. Au total, ils se sont retrouvés en possession de 16 TB d’analyses génétiques d’organismes divers et variés, “des poissons aux microbiote humain en passant par le sol de fermes”.

Le diable est dans les détails

Mais ce qui est encore plus intéressant que cet immense registre génétique, ce sont les trésors cachés en filigrane. On sait par exemple que le génome des virus qui infectent les organismes en question est aussi capturé lors du séquençage. Or, ce matériel génétique a tendance à se fondre dans la masse de données produite par un séquençage, et donc à passer au travers des mailles du filet.

Et pour les biologistes, c’est un véritable crève-cœur, car ils savent pertinemment que cette situation les prive de découvertes potentiellement importantes. Malheureusement, il est tout simplement inconcevable d’espérer démêler toutes ces informations manuellement en espérant tomber sur un génome viral par hasard. Naturellement, Babaian et Taylor ont donc choisi de miser sur l’informatique haute performance.

Ils ont misé sur la plateforme cloud Serratus, un système optimisé pour la comparaison de séquences à très grande échelle. Grâce à cet outil redoutable, ils sont parvenus à passer cette montagne de données au peigne fin à la recherche du gène d’une enzyme un peu particulière: la polymérase ARN-dépendante, une pièce centrale de la machinerie virale. Cela leur a permis de débusquer des petits fragments de gènes viraux, disséminés aux quatre coins de leur base de données.

En compilant toutes cela, ils ont pu remonter les pistes menant à plus de 100.000 nouveaux virus, dont 9 de la famille des fameux Coronaviridae. À noter qu’il s’agit d’une grande famille de virus et qu’à l’heure actuelle, rien ne suggère que ces nouveaux représentants constituent un risque de santé publique.

Les Coronaviridae sont facilement reconnaissables aux protubérances (les péplomères) qui semblent former une couronne lorsqu’on les observe au microscope – d’où leur nom de Coronavirus. © CDC – Dr. Fred Murphy / Public Health Image Library

Un “réseau de surveillance” virologique

Il s’agit d’informations partielles, qui ne permettent pas de cartographier entièrement le génome comme un séquençage en bonne et due forme. Mais chacune d’entre elles constitue une pièce d’un vaste puzzle évolutif; les chercheurs peuvent les exploiter pour reconstituer de véritables arbres généalogiques viraux.

Cette filiation est très importante lorsque l’on est confronté à un nouveau micro-organisme. En effet, si l’on peut identifier un lien de parenté avec un virus déjà documenté, il est beaucoup plus facile de comprendre son fonctionnement et, si nécessaire, de prendre les mesures adaptées dans un délai acceptable. “Nous avons transformé cette base de données en un véritable réseau de surveillance virologique”, explique Babaian.

C’est précisément le genre de travail de fond qui nous a manqué avant la crise du Covid-19. En étant davantage proactif sur cette question, il aurait peut-être été possible d’empêcher que la situation ne tourne au désastre après l’apparition des premiers cas. Espérons que des études analogues continueront d’être menées par les chercheurs; il s’agit de notre meilleure arme pour espérer répondre aux futures menaces virales dans les temps. Un jour, ces travaux de ce type nous permettront peut-être de lutter plus efficacement contre un micro-organisme encore plus dangereux sans être pris au dépourvu.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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Source : Science

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