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Astronomie : un sursaut radio record surprend les chercheurs

Des astronomes ont repéré un sursaut radio unique en son genre, qui se distingue à la fois par son intensité et son origine extrêmement lointaine.

Depuis qu’ils ont été observés pour la première fois en 2016, les astronomes enregistrent régulièrement des sursauts radio rapides (ou ou FRB, pour Fast Radio Burst). Ce sont de violentes décharges, brèves mais exceptionnellement intenses qui voyagent à travers le cosmos. Tout récemment, des astronomes australiens ont publié une étude sur un FRB très particulier; il se distinguait notamment par sa provenance.

Cet événement, baptisé FRB 20220610A, a été capturé par l’ASKAP, un grand télescope radio situé en Australie. Et lorsqu’il a frappé les capteurs de l’observatoire, l’intensité du sursaut a pris les astronomes au dépourvu. C’est plutôt rare, car tous les FRB sont déjà des phénomènes très énergétiques ; en l’espace de quelques millisecondes, ils peuvent transmettre autant d’énergie que notre Soleil en produit sur plusieurs mois.

Les chercheurs sont donc habitués à ce que leurs capteurs s’emballent. Mais celui-ci était particulièrement violent ; c’était l’un des plus énergétiques jamais enregistrés. En moins d’une milliseconde, il a transféré une énergie équivalente aux émissions totales de notre étoile sur une période de trente ans !

Un voyage de huit milliards d’années-lumière

L’équipe a donc tenté d’en déterminer l’origine, afin d’en apprendre davantage sur les mécanismes qui génèrent ces flux d’ondes radio surpuissants. C’est une thématique très active en astronomie. Les chercheurs considèrent que ces sursauts proviennent sans doute de magnétars, des étoiles à neutrons dotées d’un champ magnétique surpuissant. Par contre, les mécanismes précis qui génèrent ces FRB demeurent mystérieux. Il existe des pistes prometteuses, comme les tremblements d’étoiles. Mais personne n’est parvenu à le prouver rigoureusement pour le moment.

Pour remonter à la source, les chercheurs se sont tournés vers l’European Southern Observatory, l’institution qui gère le Very Large Telescope. Cet instrument situé dans le désert de l’Atacama, au Chili, est un véritable bijou d’ingénierie. Il est constitué de quatre télescopes distincts, tous équipés d’un énorme miroir de plus de huit mètres de diamètre. Ensemble, ils forment un gigantesque interféromètre qui permet d’observer une grande variété d’objets célestes avec une précision extrême, notamment grâce à un système d’optique adaptative très avancé qui corrige les fluctuations de l’atmosphère.

Ces performances ont permis aux astronomes de jeter un coup d’œil sur la galaxie d’où provenait le signal. Et à leur grande surprise, ils ont pu déterminer qu’elle était particulièrement éloignée ; le signal a voyagé pendant environ huit milliards d’années avant de frapper la Terre. Selon les chercheurs, il s’agit donc du FRB le plus lointain jamais enregistré, et avec une avance considérable. Il a pulvérisé le record précédent de plus de 50 %.

Un mouchard cosmique chargé d’informations

C’est une très bonne nouvelle pour les astronomes. Car au-delà de ce record, qui est finalement assez anecdotique dans l’absolu, ces FRB qui voyagent sur de très longues distances peuvent aider les chercheurs à faire avancer les travaux sur une autre grande question de l’astrophysique moderne : le « déficit » de masse de l’univers.

C’est une thématique absolument fondamentale pour la cosmologie à grande échelle, mais aussi très débattue. En effet, les différentes méthodes qui permettent d’estimer la masse totale de l’Univers donnent des réponses incompatibles. Et surtout, elles vont souvent à l’encontre des modèles théoriques actuels, ce qui pose un gros problème.

« Si l’on mesure la quantité de matière “normale” dans l’Univers — les atomes qui nous constituent —, on se rend compte que plus de la moitié de la matière prévue par les modèles manque à l’appel », explique Ryan Shannon, co-auteur principal de l’étude. « Nous pensons que cette matière manquante se cache entre les galaxies, mais qu’elle est probablement trop chaude et diffuse pour être repérée avec les techniques traditionnelles ».

C’est là qu’interviennent les FRB. En tant qu’ondes électromagnétiques, ils pourraient être particulièrement sensibles à ce matériel ionisé. En théorie, ils pourraient “enregistrer” des informations sur la matière insaisissable qui occupe l’espace intergalactique. Et plus ils voyagent sur de très longues distances, plus ils récoltent d’informations ; les spécialistes appellent cela la relation de Macquart, en hommage à l’astronome qui a mis ce phénomène en évidence.

Et c’est à ce niveau-là que ce papier sur FRB 20220610A représente un gros progrès. En étudiant les nuances du signal, les chercheurs australiens ont repéré des motifs qui suggèrent que cette relation est toujours valable au moins jusqu’à 8 milliards d’années-lumière. Une bonne nouvelle pour la solidité des modèles théoriques actuels. « Certains FRB récents semblaient désobéir à cette règle, mais nos mesures confirment que la relation de Macquart tient bon au-delà de la moitié de l’Univers connu », résume Shannon.

Vers l’infini et l’au-delà

Même si tous les phénomènes associés aux FRB ne sont pas encore parfaitement compris, il s’agit donc de ressources précieuses qu’il va falloir continuer d’étudier. « Nous ne savons pas encore ce qui provoque ces sursauts d’énergie massifs, mais notre papier confirme que ces FRB permettront de détecter la matière entre les galaxies, pour mieux comprendre la structure de l’Univers », résume l’astronome.

« Le fait que les FRB soient aussi fréquents est fantastique. Cela rend cette discipline est extrêmement prometteuse, parce que l’on pourra faire répliquer ces travaux sur des dizaines de millier de sursauts. A partir de là, nous pourrions créer une nouvelle carte de la structure de l’Univers, et l’utiliser pour répondre à de grandes questions en cosmologie », se réjouit Shannon.

La mauvaise nouvelle, c’est qu’il va être quasiment impossible de faire mieux pour le moment. Même les télescopes de pointe, comme le VLT, commencent à atteindre leurs limites. Pour obtenir des mesures plus précises, il va falloir regarder encore plus loin, ce qui nécessitera de nouveaux instruments encore plus performants.

La bonne, c’est que la relève est déjà en chemin. D’ici quelques années, les chercheurs pourront bénéficier de nouveaux télescopes de pointe comme le prochain monstre de l’ESO, sobrement baptisé… Extremely Large Telescope. À partir de 2028, ce colosse de 39 mètres de diamètre va pulvériser les records du VLT. Il pourra donc enregistrer des FRB encore plus anciens que celui-ci, et peut-être lever le voile une fois pour toutes sur le déficit de masse de l’Univers.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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2 commentaires
  1. Merci pour les infos ! Ces FRB sont bien réels mais il sera très difficile de connaître leurs provenances dû moins pour le moment ! Vu l énorme quantités de planètes qui nous entourent dans le Kosmos!
    Mais plus prêt de nous , quand donc sera t il possible de “capter” les signaux de nos “Amis” circulant à vues dans leurs Ovnis que l on peut apercevoir la nuit en ajustant nos lunettes d observations des étoiles ! Cela serait un énorme bond en avant pour notre Humanité !
    Merci thanks you a tous

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